renfermassent également dans les positions qu’ils occupaient. c’est ce qu’on appela l’arrangement du 16 mars.
Le gouvernement russe, en s’engageant pour l’avenir, avait eu soin de réserver le cas de circonstance imprévue et de force majeure. Ce cas, comme il était facile de le prévoir, n’a pas tardé de se présenter. Le général Komarof, se sentant gêné par le voisinage des patrouilles afghanes, les somma d’évacuer Penjdeh. Les Afghans n’ayant pas obéi, il les en délogea par la force. Le général russe eut beau rentrer bientôt après dans ses cantonnemens, en arrière de Penjdeh, les Anglais virent dans cet incident une provocation en même temps qu’un manque de foi. Durant une ou deux semaines, la guerre sembla inévitable, d’autant que les explications du général Lumsden, témoin de la collision, étaient en flagrante contradiction avec celles du général Komarof. Pour sortir de cette épineuse difficulté, il fallait aux deux gouvernemens beaucoup de sang-froid et beaucoup de bonne volonté. On sait comment ils s’entendirent pour accepter un arbitrage qui n’eut pas lieu de s’exercer. Entre temps, on finit par comprendre, à Londres comme à Pétersbourg, qu’au lieu de se borner à négocier sur les causes de l’incident de Penjdeh, il valait mieux examiner d’abord le fond de la question et le tracé même de la frontière. L’Angleterre se décidait ainsi à adopter la marche proposée par M. de Giers, laquelle était la seule naturelle et la seule efficace. On se mit à débattre, de cabinet à cabinet, le tracé général de la frontière ; et, comme les deux gouvernemens étaient sincères dans leur désir d’éviter une collision, ils étaient près de s’entendre lorsque la chute du cabinet Gladstone interrompit les négociations. Ni de Londres, ni de Pétersbourg, il n’était survenu aucun de ces incidens irritans, aucune de ces provocations calculées, qui, à certaines heures, on l’a bien vu en 1870, suffisent à précipiter un conflit.
Des deux côtés, tout en désirant vivement conserver la paix, on s’était activement préparé à la guerre, du côté de l’Angleterre surtout, la Russie étant dès longtemps prête aux rencontres asiatiques. Des deux côtés, on avait pesé ses forces et celles de l’adversaire, les chances de succès, les complications possibles, les alliances à espérer, les hostilités à redouter. Les esprits à vue quelque peu étendue s’étaient aperçus, à Pétersbourg comme à Londres, que les perspectives ouvertes par une pareille guerre étaient aussi vastes que confuses, et que, si les belligérans étaient certains d’en