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diplomatique, qui n’a point de racine dans l’histoire et qui ne tient nul compte des intérêts et des vœux des populations, n’a évidemment aucune chance de durée.

— La question des langues donne lieu ici, comme partout où diverses nationalités se trouvent réunies dans un même état, à des difficultés réelles et à des réclamations nombreuses. L’article 22 du statut organique renferme à ce sujet des dispositions très sages : il prescrit que la langue officielle sera celle de la majorité, mais que, quand il existera une minorité égale à la moitié de la majorité, la langue de cette minorité sera également employée. Toutes les lois et les règlemens doivent être publiés dans les trois langues principales : bulgare, turque et grecque, et devant les tribunaux, les particuliers ont le droit de se servir, à leur choix, de l’une de ces langues. Le discours d’ouverture du gouverneur général est lu aussi en bulgare, en turc et en grec. Mais, au sein de la chambre et des conseils départementaux et communaux, les propositions et les discussions ont lieu en bulgare. Les Grecs et les Turcs ont le droit de parler en leur langue ; seulement, s’ils veulent se faire comprendre, ils doivent bien employer le bulgare, qui devient ainsi, en réalité, la langue dominante. Les Turcs et les Grecs se plaignent ; mais est-il possible de régler autrement cette difficile question ?

— Ici, comme en Bulgarie, tous les cultivateurs sont propriétaires des terres qu’ils occupent ; cela est vrai surtout depuis la dernière guerre. Avant cette époque, dans les villes et dans quelques villages habitaient de riches Turcs, possédant de grands tchifliks ou fermes, qu’ils louaient à des paysans bulgares, lesquels payaient en Mature, suivant la qualité du sol, de 1 à 4 chiniks (20 litres) de blé par deunum égal à 1,600 mètres carrés.

— Je suis présenté à M. J.-E. Guéchof, l’un des hommes les plus distingués et les plus instruits de ce pays-ci : il parle et écrit également bien le français et l’anglais. né à Philippopoli, il a fait ses études à la Victoria University de Manchester. Pendant la guerre turco-russe, il écrivit quelques lettres au Times sur les atrocités commises en Bulgarie en 1876, ce qui lui valut d’être jeté en prison, exilé en Asie-Mineure et presque mis à mort. En 1879, il fut envoyé en mission pour présenter aux grands états les vœux de la Roumélie orientale, qui, hélas ! ne furent pas écoutés. À son retour, il fut nommé président de l’assemblée pendant ses trois premières sessions. Il me communique quelques chiffres qui font connaître la situation financière actuelle. Le budget de 1883-1884 s’élève à 72,196,509 piastres en recette et en dépense (100 piastres font une livre turque, qui vaut, au pair, 22 fr. 50.) Quel est l’état qui peut se vanter d’arriver à un pareil équilibre budgétaire ? Il est vrai que