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rencontrait 3.94 habitans par cote en 1826, 2.95 en 1848, 2.61 en 1875. En un demi-siècle, tandis que la population s’accroissait de 15 pour 100, le nombre des cotes augmentait de 36 à 37 pour 100, plus d’un tiers. Il faut dégager de ces chiffres le nombre des propriétaires, et cela ne se peut faire que par induction. L’ancien ministre des finances Gaudin estimait que, à la fin du premier empire, le nombre des propriétaires pouvait être de 4,833,000, « payant, l’un dans l’autre, dans deux endroits différens, ce qui, ajoutait-il, n’a rien d’improbable. » Cette proportion de deux cotes foncières par contribuable a paru trop faible à certains statisticiens, qui ont admis celle de trois cotes. M. Léonce de Lavergne a accepté cette évaluation. Elle paraît inexacte à M. de Foville et à nous-même. Ce qui domine, comme nombre, c’est le très petit contribuable, et celui-là ne paie qu’une cote foncière ; le nombre des moyens contribuables qui en paient trois ou quatre, ou même des gens qui en paient dix ou quinze, ne peut certainement pas faire ressortir une moyenne de trois cotes par propriétaire. Des calculs très minutieux ont été faits, à deux reprises, pour se rendre compte du nombre de propriétaires correspondant à cent cotes ; l’administration arrivait au rapport de 63 propriétaires pour cent cotes en 1851 et de 59.4 en 1879 ; elle en concluait que le nombre des propriétaires, en France, pouvait s’élever à 7,584,901 en 1851, et à 8,454,218 en 1879. Il est vraisemblable qu’il faut un peu en rabattre, le chiffre des cotes parasites étant parfois très considérable. Par des investigations dans le détail desquelles nous ne pouvons entrer, M. de Foville conclut qu’avant la Révolution il se trouvait en France 4 millions de propriétaires ; vers 1825, plus de 6 millions et demi ; en 1850, de 7 millions à 7 millions et demi ; en 1875, environ 8 millions. Depuis lors, ce nombre n’aurait guère augmenté ; peut-être même, depuis trois ou quatre ans, sous l’influence de la crise agricole, serait-il en légère diminution. Nous serions, quant à nous, disposé à croire qu’on peut encore diminuer de 4 ou 5 pour 100 ces chiffres ; l’évaluation de Gaudin de deux cotes par propriétaire nous paraît celle qui se rapproche le plus de la vérité, de sorte que nous conclurions à 7 millions et demi environ de propriétaires fonciers en France ; si l’on y joint les membres des familles, c’est plus de la moitié de la population totale et les deux tiers au moins des habitans des campagnes.

Si l’on ne peut déterminer que d’une manière conjecturale le nombre des propriétaires, on ne peut non plus arriver à une précision absolue quant à l’importance des différentes catégories de propriétés. L’administration a fait cinq fois, dans le courant de ce siècle, en 1816, en 1826, en 1835, en 1842, en 1858, le