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C’est un travail de miniaturiste plus que d’architecte, une de ces restitutions pittoresques qui attirent le public et le réconcilient avec la géométrie rébarbative. Peut-être y a-t-il quelque fantaisie dans cette mise en scène ; mais le jeu des acteurs fait regarder le théâtre : c’est là l’essentiel. Ici, l’hypothèse n’a rien de hasardé ; elle s’appuie partout sur des certitudes matérielles. Nous restons éblouis de l’audacieuse splendeur que le peuple-roi savait donner à ses lieux de distraction et de plaisir. On a remarqué aussi, parmi quelques autres études sur l’architecture antique l’Erechtheïon par M. Blondel, un Portique de Pompéi par M. Boitte, le Pont romain d’Ambrussum par M. Nodet et plusieurs jolis croquis de M. Courtois-Suffit, dans ses envois de bourse de voyage, entre autres une Fontaine de mosaïque à Pompéi et quelques détails de corniches de même provenance.

Les travaux des architectes de la Commission des Monumens historiques ou de ceux qui marchent sur leurs traces nous révèlent, chaque année, combien notre sol est riche encore en trésors du passé et nous disent combien sont coupables les administrateurs ou les particuliers qui ne veillent pas avec sollicitude sur leur conservation. Les grands centres de l’activité française au moyen âge et à la renaissance ont été depuis longtemps explorés ; il semble que la mine des découvertes y soit épuisée. Cependant, il n’en est rien, comme le savent tous les touristes ayant quelque loisir et quelque curiosité, qui se mettent, en province, entre les mains d’un archéologue local connaissant bien sa ville ! Que de coins merveilleux on y retrouve encore ! que de débris grandioses ou charmans que l’on voudrait à tout prix conserver, si l’on avait simplement le sens juste de ses intérêts matériels, mais qu’une ignorance indifférente ou malveillante laisse pourtant disperser avec un stupide mépris ! Combien l’on doit savoir gré aux dessinateurs qui relèvent avec soin l’état actuel de ces édifices ignorés et précieux, dans l’intention de l’es restaurer, et qui tout au moins nous en conservent-un souvenir précis pour le cas où ils viendraient à disparaître ! Rien que pour cette période curieuse de transition entre le style roman et le style ogival qui, suivant les contrées, se raccourcit ou s’allonge durant les XIIe et XIIIe siècles, combien nous arrivent de divers côtés de renseignemens intéressans ! L’Église abbatiale de Vezelay est des plus connues ; il n’est point inutile pourtant d’y retourner avec M. Degeorge, qui en étudie avec soin, dans une vue pittoresque, le narthex et la nef ; mais ne sont-ce pas des excursions inattendues que celles dans lesquelles nous entraînent M. Calinaud vers la petite Église de Marnans (Isère) et M. Chaine vers celle d’Ydes (Cantal) ? On y voit combien la tradition romane, dans sa sévérité apparente, se pliait avec souplesse et charme soit à des nécessités locales, soit