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Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 76.djvu/332

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aux Khiti ; s’ils n’en profitèrent pas pour conquérir toute la Syrie, c’est que, juste vers le temps où l’Egypte se repliait sur elle-même, l’Assyrie grandissait et commençait à rêver de conquête. C’était de l’est désormais que viendrait le péril. Cadech n’était plus menacée ; c’était Gargamich qu’il faudrait défendre, Gargamich qui commandait le meilleur gué de l’Euphrate. Dès qu’ils tourneraient leurs regards vers l’Occident, les rois de Calach et de Ninive ne pouvaient manquer de convoiter une position qui présentait de tels avantages.

Dès la fin du XIIe siècle, Teglathphalasar Ier franchissait le fleuve et traversait la Syrie septentrionale ; il atteignait, auprès d’Arad, la Méditerranée. Avait-il occupé, avait-il tourné Gargamich ? On l’ignore ; toujours est-il que son petit-fils fut battu près de cette place par les Khiti. Près de deux siècles s’écoulèrent sans que ceux-ci fussent inquiétés de nouveau ; mais, vers 877, Assournazirpal envahit le Naharana. Les Khiti n’obéissaient plus alors, comme du temps des guerres contre l’Egypte, à un chef unique ; la sécurité rétablie avait favorisé le morcellement. Le péril commun ne suffit pas à resserrer des liens qui s’étaient trop relâchés. Le roi de Gargamich, Sangar, ouvrit les portes de sa forteresse ; la plupart des autres chefs l’imitèrent ; ceux qui tentèrent de résister furent écrasés. Ainsi découverte, la Phénicie tout entière se soumit au conquérant. Salmanasar III consolida le pouvoir que son père avait déjà exercé sur cette région. La seule résistance sérieuse qu’il y rencontra fut celle que lui opposa Benhadad, le roi de Damas, à la tête d’une coalition où figuraient les juifs de Samarie, des contingens arabes et des mercenaires égyptiens ; les dix mille fantassins de Hamath que mentionnent les récits assyriens devaient être des Khiti. La bataille eut lieu près de cette dernière ville ; Salmanasar fut vainqueur (854). Pourtant plus d’un siècle s’écoula encore avant que Damas fût pris et son peuple déporté en Mésopotamie.

Bien avant la chute de ce dernier boulevard de la Syrie, ce qui restait encore des Khiti avait perdu toute importance. Les prophètes juifs font allusion à l’abaissement de « Hamath la grande, » comme ils l’appellent. Pisiris, prince de Gargamich, est inscrit sur la liste des tributaires, sous Teglathphalasar II. Quand il y eut à Ninive un changement de dynastie, ce prince crut le moment favorable pour reconquérir son indépendance ; mais il avait compté sans le nouveau roi, Sargon, qui accouru aussitôt, entra dans la ville et la pilla, chargea Pisiris de chaînes et transporta ses sujets au-delà de l’Euphrate ; il les remplaça par des Assyriens (717). Le bruit de la [1]

  1. Amos, VI, 2.