ici, c’est plutôt ignorance et timidité. Comme l’art assyrien, l’art hétéen ne voit le corps qu’en gros, sous le vêtement ; mais il en saisit assez bien la masse et les grandes lignes ; le mouvement général ne manque pas de justesse et de franchise. D’ailleurs point de scènes de chasse ou de combat. L’artiste ne paraît pas s’être jamais hasardé à l’imitation des attitudes violentes et tourmentées ; mais là où il multiplie les personnages, il les groupe bien ; il a le sentiment du rythme plastique. Parfois trapues, les proportions des figures sont toujours un peu lourdes ; ce sont à peu près celles qu’a adoptées la sculpture chaldéo-assyrienne.
Nous ne prétendons pas conclure de ces ressemblances que tous ces monumens soient contemporains les uns des autres ni qu’ils soient tous l’œuvre d’un même peuple. L’art dont nous avons essayé de définir les caractères a ses variétés et, si l’on peut ainsi parler, ses dialectes. Près d’un millier d’années se sont écoulées entre le temps où la puissance de la race hétéenne était à son comble et celui où l’influence du génie grec a commencé de se faire sentir dans l’intérieur de la péninsule. Pendant cette longue période, combien de tribus, combien de royaumes aujourd’hui plus ou moins oubliés ont pu reprendre à leur compte, en les diversifiant, les types qu’avait autrefois créés la féconde activité d’un peuple inventif et puissant !
Malgré les récentes découvertes, bien des obscurités subsistent. A quelle race appartenaient les Hétéens ? Est-ce à l’est ou à l’ouest du Taurus qu’a été constitué ce système d’écriture qui leur donne le droit de réclamer une place parmi les peuples civilisés, parmi les peuples civilisateurs ? Les maîtres de Gargamich et de Cadech ont-ils vraiment étendu leur domination jusqu’aux rivages de la mer Egée, comme tendraient à le faire croire les signes que l’on a relevés près de figures qui seraient alors des monumens de leurs conquêtes, ou bien figures et inscriptions témoigneraient-elles seulement de l’action que, par son prestige et par son commerce, le puissant empire d’au-delà de l’Halys exerçait même, à de grandes distances, sur des populations moins avancées ? Enfin cette civilisation syrienne et cappadocienne a-t-elle, par des intermédiaires, Lyciens et Cariens, Phrygiens et Lydiens, fourni à la Grèce quelques élémens que celle-ci ait pu s’approprier utilement, des mythes et des rites religieux, des formes d’art, des instrumens propres au développement et à l’expression de la pensée ?
Toutes ces questions ne comportent pas encore de réponses