tout moyen d’intimidation contre tous les états, contre toutes les villes maritimes du monde, vous subirez toutes les avanies qu’il plaira à la Chine ou aux puissances barbaresques de vous infliger, vous ne pourrez plus bombarder Tanger, réduire Saint-Jean-d’Ulloa, bloquer Madagascar et encore moins la Chine, ni protéger votre commerce et les navires qu’il envoie sur tous les points du globe.
Plus de bâtimens, rien que le bateau-torpille et le bateau-canon, plus de flotte et seulement des flottilles, voilà le rêve du moment, et cela sous prétexte que Christophe Colomb a pu découvrir le Nouveau-Monde avec de simples caravelles, que les flottilles de l’antiquité et celles du moyen âge ou du commencement de l’ère moderne ont suffi pour accomplir de grandes choses, témoin Salamine, Actium, Lépante, et que les vaisseaux ne sont plus aujourd’hui que des impedimenta impuissans non-seulement à attaquer, mais à se défendre eux-mêmes ! S’il en est ainsi, vous avez mille fois raison, mais alors il faut être logique, il faut avoir le courage de ses convictions ; le patriotisme l’exige. Si vous pensez que notre flotte n’est qu’une inutilité, qu’elle n’est plus l’expression à aucun degré de la puissance navale et que celle-ci réside uniquement dans une grande flottille composée de plusieurs centaines de torpilleurs, de canonnières, supprimez résolument tout le reste ; n’imposez pas au pays déjà si obéré la charge d’un budget maritime de 200 millions que vous déclarez dépensés follement. Réduisez des trois quarts un personnel devenu inutile. Pour construire, organiser, commander et administrer une flottille, quelque nombreuse qu’elle puisse être, vous n’avez pas besoin d’arsenaux immenses[1] regorgeant
- ↑ le lecteur sera sans doute bien aise de pouvoir se faire une idée de ce qu’est notre établissement naval par l’importance du seul arsenal de Toulon. Ces renseignemens sont tirés d’un document officiel. Conformément à la loi du 29 décembre 1873, un tableau indiquant les surfaces des propriétés immobilières appartenant au département de la marine au port de Toulon a été transmis au ministre pour être remis à l’assemblée nationale (dépêche du 21 février 1874). On y relève les données suivantes, exprimées en mètres carrés :
Arsenal d’armement et de radoub, divisé en trois parties continues et communiquant librement entre elles, de manière à ne faire qu’un tout.
Principal 354.557 De Castigneau 399.973 De Missiessy 671.671 Total pour l’arsenal d’armement et de radoub. 1.426.161 Arsenal de construction au Mourillon 251.628 Poudrière de Hayoubrau 224.987 Poudrière de Milhau 35.656 Ateliers de pyrotechnie de Brégaillon 121.528 Total pour l’ensemble de l’arsenal du port militaire. 2.059.960
NOTA. — Les grandes poudrières à fulmicoton, etc., ne sont pas comprises ici.
Immeubles de toute espèce, hôpitaux, casernes, etc., et situés hors de l’arsenal :
En ville 128.803 A Saint-Mandrier 136.586 Au faubourg du Mourillon 89.736 355.125 355.125 Total général 2.415.085
Soit 205 hectares et demi pour les arsenaux, et 35 hectares et demi pour les établissemens de la marine en dehors.