enfin, qui, tant d’années avant MM. Got et Coquelin, savent s’attirer la considération et partager la recette, — en vérité, l’entreprise a quelques attraits. Mais le moyen de rendre clair l’artifice naïf et compliqué de cette comédie où une fantasmagorie est encadrée, — les personnages de celle-ci, à la fin, jouant une tragédie qui forme une troisième action dans la seconde ? Le moyen d’empêcher que cette tragédie ne soit fort ennuyeuse, ou de la remplacer par une autre sans meurtrir impertinemment l’ouvrage ? M. Porel y a renoncé, M. Claretie n’y songe pas ; en ceci, nous approuvons leur sagesse.
La bonne manière, à présent, de goûter ces moindres œuvres des classiques, c’est de s’en donner le spectacle dans un fauteuil. Etendez la main vers ces admirables éditions que publie la maison Hachette, vers cette collection des Grands Écrivains de la France : vous tenez là Corneille, Racine, Molière tout rafraîchis et tout vivans[1]. Alors, — passez-moi ce dicton populaire, — le roi n’est pas votre cousin ; ou plutôt, si ! justement, vous êtes le cousin du roi, et du grand roi ; vous êtes à sa cour : ces ballets eux-mêmes, qui en firent les délices principales, se donnent à nouveau pour votre plaisir. — Au demeurant, c’est peut-être aussi la meilleure façon de jouir des chefs-d’œuvre, à présent qu’on n’a plus guère d’occasions de les voir sur la scène, ni surtout de les voir bien joués, et du milieu d’un public assez chaud. Et, pour les chefs-d’œuvre, en voici de petites éditions, réduites de celles-là, discrètement annotées, et qui donnent pourtant aux grandes personnes comme aux écoliers l’hallucination du drame comique ou tragique[2]. Ah ! Corneille, Racine et Molière sont heureux en ce temps-ci, du moins ailleurs qu’au théâtre !
De mon fauteuil à ma bibliothèque, voilà donc le champ de mes « divertissemens. » Je n’espère pas renouveler jamais les splendeurs de Vaux ni de Versailles. Si pourtant je possédais demain une bicoque à la campagne, j’y attirerais volontiers quelques voisins, je leur mettrais entre les mains l’Art de dire, de M. Leloir[3], je les prierais de s’exercer d’après les conseils de ce jeune comédien ; et, pour le jour de ma fête, je leur distribuerais les rôles de la Sortie de Saint-Cyr, l’honnête et gentille petite pièce de M. Verconsin, par laquelle Mlle Reichenberg et M. Got nous ont annoncé l’approche des vacances.
Louis GANDERAX.