Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 77.djvu/687

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
L’ABDICATION
DU
PRINCE ALEXANDRE DE BULGARIE

Si les marques d’une sympathie aussi bruyante que sincère peuvent consoler un prince de la perte de son trône, le prince Alexandre de Bulgarie a dû trouver quelque adoucissement à sa disgrâce dans les témoignages qui lui ont été prodigués non-seulement par ses anciens sujets, mais en Autriche, en Hongrie, en Allemagne, en Italie, en Angleterre. Le héros de Slivnitza avait su se recommander à l’estime de l’Europe et à l’affection de son peuple par ses hauts faits dans la guerre serbo-bulgare. Au moment où ses affaires semblaient désespérées, quand les Serbes étaient près d’entrer à Sofia, capitale trop excentrique, trop rapprochée d’une frontière dangereuse, son courage, sa résolution, ses talens militaires avaient rétabli sa fortune. On l’avait vu refouler l’invasion, poursuivre chaudement l’envahisseur, et les grandes puissances avaient dû intervenir pour arrêter ce jeune vainqueur qui semblait prendre la route de Belgrade, et pour l’obliger à remettre l’épée au fourreau. Il avait montré dans ces conjonctures périlleuses tout ce que vaut, tout ce que peut un homme de cœur, qui a pris de bonnes leçons et étudié la guerre à Potsdam.

Il était tout naturel d’imaginer qu’un prince qui avait si bien mérité de sa patrie d’adoption, et dont l’Europe avait consacré les succès en le nommant pour cinq ans gouverneur général de la Roumélie orientale, pouvait compter à l’avenir sur le dévoûment empressé des Bulgares, qu’il ne lui restait plus qu’à se marier, par les soins obligeans