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Page:Revue des Deux Mondes - 1886 - tome 77.djvu/938

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examiné par l’inspecteur médical sous la présidence du maréchal de la noblesse. Figure-t-il dans la classe des négocians, des petits employés ou de la bourgeoisie, le juge d’arrondissement préside, assisté du chef de la police et du maréchal de la noblesse du district. Une fois l’état de démence constaté, le comité d’examen transmet le dossier au sénat, la plus haute institution législative de l’empire, et, en attendant, il se borne à prendre les mesures nécessaires pour l’internement du malade et la sauvegarde de ses propriétés ; s’agit-il d’un paysan, ses conclusions n’ont pas besoin de la sanction du sénat. Les personnes reconnues aliénées par ce dernier sont confiées aux soins de leurs parens.et, en cas de refus, placées dans un asile. Mêmes formalités, même examen pour la mise en liberté. Les aliénés criminels et les indigens sont gratuitement entretenus ; ceux qui ont des ressources paient une pension modérée. La loi entre dans des détails assez minutieux pour la fondation et le fonctionnement des asiles : un local isolé, spacieux et bien construit « en sorte qu’aucun aliéné ne puisse s’enfuir ; » comme directeur « un homme de caractère ferme, consciencieux et humain ; » les surveillans et infirmiers, nombreux, bien payés, soumis à la discipline militaire, ayant droit à une retraite, choisis de préférence parmi les anciens soldats ; défense de placer des sentinelles en faction dans les chambres, les jardins et les cours qui servent aux malades. Afin de stimuler le zèle des zemstvos en leur épargnant de trop lourdes charges, le tsar, par un ukase du 3 novembre 1879, a décidé qu’on leur tiendrait compte, dans la proportion de 50 pour 100, des dépenses des asiles. A la fin de 1884, la Russie possédait 67 maisons de santé avec 5,583 lits et les frais d’entretien s’élevaient à 1 million de roubles environ, dont les zemstvos et les comités de charité publique locaux paient la moitié : le fisc impérial consacre de plus une somme annuelle de 82,180 roubles à la maison de santé de Kazan, qui contient 200 lits. Au point de vue de l’enseignement des affections mentales, Saint-Pétersbourg possède tous les moyens d’instruction dont on jouit à Paris, et, dans les cinq asiles de cette ville, les aliénés trouvent des soins physiques et moraux qui ne laissent guère à désirer. L’établissement d’Alexandre est situé à 11 verstes de Saint-Pétersbourg ; aussi dit-on familièrement d’un individu qui perd sa raison : « On devrait bien l’envoyer à la 11e verste. » Partout le directeur, un médecin et ses assistans, ont sous leurs ordres les aides-chirurgiens, infirmiers, instruits, intelligens qui ont passé deux ans à l’académie militaire, sont organisés militairement, et dans les hôpitaux, dans les ambulances, rendent les plus précieux services. L’œuvre de réforme est commencée et ne s’arrêtera plus.