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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 79.djvu/371

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de gazettes à la main plus de 2,000 livres par an ; sans qu’il soit avéré cependant qu’il en ait fait passer à l’étranger. Il a été assez puni de sa faute par cinq mois de prison et la perte de son emploi, et cependant il faut pour l’exemple le reléguer hors de Paris; afin, ajoute le rapport, d’en imposer aux écrivains de la même espèce, à qui « ce bannissement est plus insupportable que toute autre peine.» On voit que, si les procédés ne sont plus les mêmes, les idées et les mobiles qui constituent le fond de la vie parisienne n’ont guère changé depuis bientôt deux siècles.

Autrement ou Halterman, chassé de Paris, se retira sans doute en Provence, où l’attendait le patronage de comte de Grignan. Économe et patient à la façon des Allemands, il dut y revenir avec une fortune assez ronde pour établir honorablement sa fille Andrée en lui faisant épouser l’arrêtiste Joseph Bonnet, en 1724. Le marié, avocat bien posé, était du reste, à cette date, très loin de la jeunesse, puisque, né à Brignoles vers 1660, il avait atteint sinon dépassé la soixantaine. Les fils d’Autrement, nous l’avons vu, officiers dans les troupes de l’électeur palatin, passaient, quoi qu’il en fût, pour de bons gentilshommes.

Il nous reste, avant d’avoir achevé cette modeste étude, à prendre congé du chevalier de Perrin, dernier survivant de ceux que nous venons de mettre en scène. Jusqu’ici, on savait seulement qu’il était resté à Paris, fort apprécié du beau monde et qu’il avait consacré la fin de sa vie à préparer une nouvelle édition des Lettres de Mme de Sévigné, celle qui parut en 1754. C’est surtout dans cette édition qu’il encourut le reproche d’avoir remanié par purisme et pédanterie le style de Mme de Sévigné. Mais, en dehors de ces fonctions d’éditeur et de correcteur, le chevalier en avait-il d’autres qui le retinssent à Paris? Plusieurs documens nous ont révélé tout récemment qu’en 1746 et peut-être auparavant il était attaché au maréchal de Belle-Isle et lui servait de secrétaire. Il est certain qu’il l’accompagna en Provence lors de l’invasion des Austro-Sardes, que le maréchal repoussa victorieusement. Cette invasion fut en tout la répétition de celle de 1707. La marche des ennemis. Grasse mis au pillage, Toulon menacé, le pays rançonné du Var à la Durance, présentent le même tableau. La résistance fut organisée sur le même plan et avec le même succès. Pour compléter le parallèle, c’était le fils du chevalier de Saporte, Jean-Étienne de Saporta, à qui le maréchal, par une commission contresignée de Perrin, confia la garde du Verdon et le commandement supérieur des milices de la Haute-Provence. Les Autrichiens défaits repassèrent le Var et Nice fut occupée. Le chevalier de Perrin y reçut l’hospitalité du comte Raynardi, membre du sénat. De là des relations qui survécurent à l’occupation,