en leur style imagé. L’insurrection était écrasée, la coalition kabyle dissoute, Ben-Zamoun en fuite; de ce côté, la Métidja n’avait plus rien à craindre.
Dans ce même temps, au sud-ouest d’Alger, les opérations habituelles en cette saison se poursuivaient contre les éternels Hadjoutes, encouragés et soutenus par le bey de Miliana, Sidi-Mbarek. Averti par le général de Négrier que les forces de l’ennemi grossissaient, le gouverneur se mit de sa personne en campagne. Son dessein était de fouiller jusqu’au fond le bois des Karesa, et pour y mieux réussir, il avait ordonné aux zouaves du camp de Maelma d’aborder le taillis d’un côté pendant que deux autres colonnes, venues de Boufarik et du camp de la Chiffa, y pénétreraient d’autre part. Ce bois, qui était le repaire accoutumé des Hadjoutes, couvrait alors un très grand espace entre le Bou-Roumi, le lac Halloula et des collines qui se prolongent parallèlement à la mer, de Koléa au Djebel-Chenoua ; l’Oued-Djer le traversait de part en part à travers des fourrés à peu près impraticables. Dans la nuit du 7 au 8 juin, les trois colonnes convergentes commencèrent leur mouvement; au point du jour, les Hadjoutes étaient surpris, refoulés, acculés aux collines dont les Français garnissaient les crêtes, lorsque tout à coup deux officiers du bey de Miliana se jetèrent au milieu de la fusillade en criant : «La paix ! la paix! » Sidi-Mbarek venait de recevoir un courrier d’Abd-el-Kader avec le texte arabe du traité de la Tafna et une lettre de l’émir au gouverneur-général. « Tu ne dois pas ignorer, disait-il, la paix que nous avons faite avec le général Bugeaud. Nous aurions désiré qu’elle se fît par ton entremise, parce que tu es un homme sage, doux et accoutumé à ce qui se pratique dans le cabinet des rois ; mais, le général d’Oran nous ayant écrit qu’il avait le seing du roi pour traiter, nous avons passé avec lui, vu sa proximité, un acte authentique à ce sujet. Calmez-vous donc de vos côtés ; vous n’éprouverez aucun mal de ce que pourront faire les Arabes des contrées placées sous mon commandement, du côté de Boufarik, de la Métidja et des environs. Dans peu, s’il plaît à Dieu, je me porterai de vos côtés ; je ferai cesser le désordre, je tirerai au clair toutes les affaires, pour qu’il ne reste plus rien qui ne soit en harmonie avec la raison. » La lettre se terminait par cette formule du khodja-secrétaire : « Écrit par ordre de notre seigneur l’émir des croyans, celui qui rend la religion victorieuse; que Dieu le protège et que la délivrance arrive par lui ! »
Le ton hautain, protecteur, insolent de cette missive donnait aux obscurités du traité de la Tafna leur sens le plus évident désormais et le plus clair. Le général de Damrémont en fut froissé; cependant il ne voulut pas s’opposer pour sa part à l’exécution d’un traité fait par un autre, aux dépens de son autorité, au mépris de ses