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avec toutes les précautions imaginables. Cette opération permit de constater l’état de la soute. La cloison étanche qui en formait une des parois, rougie pendant l’incendie par les flammes, avait échauffé celles des caisses de métal qui la touchaient, et plusieurs d’entre elles se trouvaient tordues et en partie ouvertes. Le pont en bois qui couvrait la soute était en différens endroits complètement, dans d’autres jusqu’à mi-épaisseur, calciné par le feu. Le hasard, ou le sort, ou la Providence, a voulu que l’eau des pompes tombât sur les caisses ouvertes et que les charbons ardens tombassent sur les caisses fermées!

Je suis arrivé à la fin de mon récit. Le 24 décembre, précisément quatre fois vingt-quatre heures après que l’incendie se fut déclaré, la France, constamment favorisée par un temps superbe, après avoir doublé la pointe nord de la Martinique et passé devant Saint-Pierre, mouilla à trois heures de l’après-midi à Fort-de-France, près de la jetée de la Compagnie transatlantique. Ce fut alors, et alors seulement, que nous pouvions nous dire sauvés.

Je ne saurais mieux résumer mes impressions qu’en empruntant à M. L’amiral Vignes, commandant la station des Antilles, dont j’ai eu la malchance de ne pouvoir faire la connaissance, un mot qu’il a dit après avoir visité le paquebot et constaté l’état lamentable auquel cette terrible aventure l’avait réduit : « Le sauvetage, s’est-il écrié, tient du prodige ! Il fait honneur à la marine française. »


HÜBNER.