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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 81.djvu/440

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en cercle, comme des prisonniers dans leur préau, ou causent par groupes dans un coin. On sent que ce n’est ni un repos pour l’esprit, ni un exercice salutaire pour le corps ; que c’est la continuation pure et simple des occupations fastidieuses dont se compose la journée. Les cours sont trop petites, les élèves trop nombreux, les récréations trop courtes pour qu’on ait le temps d’organiser une partie sérieuse. Et puis, au bout de quelque temps d’internat, le goût des jeux est passé.

Pour contre-balancer cette inertie musculaire si fâcheuse à l’âge de la vie où on a le plus besoin d’exercer l’appareil locomoteur, on a introduit, depuis une trentaine d’années, dans les collèges et les lycées, l’usage de la gymnastique. Cet art, qui tenait tant de place dans l’éducation chez les anciens, était, on le sait, complètement tombé dans l’oubli, lorsqu’à la fin du siècle dernier il fut remis en honneur, de l’autre côté du Rhin. Le premier gymnase fut fondé à Dessau, en 1776 ; le second à Schnepfenthal, en 1786. À partir de ce moment, ils se multiplièrent, en Suède, en Allemagne, en Suisse, en Danemark, et, depuis cette époque, la gymnastique est entrée officiellement dans les procédés d’éducation de ces pays. Elle n’a pénétré en France que beaucoup plus tard. C’est en 1818 qu’elle y fut importée par le colonel espagnol Amoros-y-Undéano, qui, forcé de quitter son pays à la suite de la restauration de Ferdinand VII, vint se réfugier dans le nôtre et y fit adopter, par le gouvernement français, les institutions gymnastiques qu’il avait établies à Madrid en 1807. Le colonel Amoros avait adopté la méthode de Pestalozzi, en la perfectionnant par l’adjonction du chant, qui rythmait, régularisait les mouvemens, et communiquait son entrain aux exercices musculaires, tout en fortifiant les organes de la respiration et de la voix.

Ce nouveau mode d’éducation eut une vogue dont les hommes âgés se souviennent encore. Toutefois, il fallut près de quarante ans pour vaincre la routine scolaire, et l’enseignement de la gymnastique n’a été obligatoire que par le décret du 13 mars 1854. On n’a pas mis d’empressement à regagner le temps perdu, car, en 1867, lorsque Vernois voulut s’assurer des progrès que cette innovation tardive avait imprimés à l’éducation physique de la jeunesse française, il eut le regret de constater que, sur 77 lycées, il n’y en avait que 33 qui fussent munis de gymnases à peu près convenables ; 81 en avaient de si mal installés qu’ils étaient à peu près inutiles, et 13 en manquaient complètement. C’était, du reste, une simple concession faite aux exigences de l’hygiène. Elle n’avait pas été prise au sérieux par le ministère de l’instruction publique. Deux leçons de vingt minutes par semaine lui avaient paru suffisantes. Aujourd’hui, les leçons sont d’une heure chacune, mais on n’en a