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aux agens de dénudation, apparaissent sous forme de saillies escarpées, d’une hauteur imposante, que l’œil peut suivre au loin; tantôt elles s’étendent comme un gigantesque mur bizarrement dentelé, tantôt elles se dressent en aiguilles. En profondeur, les filons se prolongent indéfiniment, et les travaux d’exploitation ne peuvent en atteindre la limite inférieure, quoique poussés parfois jusqu’à la distance d’un kilomètre de la surface du sol.

Au premier aspect, les filons métallifères contrastent par leur composition minéralogique avec les roches encaissantes, à quelque catégorie qu’elles appartiennent, et lors même qu’ils s’y sont soudés. Ils sont formés de minéraux très divers ; il faut y distinguer les substances utiles ou minerais, et les matières pierreuses ou gangues. Ces dernières se présentent souvent en proportion tout à fait prédominante, et de leurs variations, en quantité et en richesse, résulte beaucoup d’imprévu dans les bénéfices d’une exploitation.

Les substances diverses qui constituent les filons affectent quelquefois, par rapport à leurs deux parois, une disposition symétrique, annonçant qu’elles résultent de dépôts successivement appliqués les uns sur les autres, à la manière de ce qui arrive dans un cristallisoir ou à l’intérieur des tuyaux de fontaine qui se sont incrustés de matières pierreuses.

Rarement les filons métallifères sont isolés ; unis par un lien de parallélisme et par une ressemblance de composition, ils forment en général des systèmes ou groupes. Ils se rencontrent exclusivement dans les régions ayant subi des dislocations, dont ils apparais- sent comme une conséquence. La constitution du sol de la France fait bien ressortir cette corrélation ; tandis que les filons font défaut dans les parties dont les couches ont à peu près conservé leur horizontalité première, ils se trouvent par milliers, quoique avec une faible richesse, dans le Plateau central, les Vosges, les Pyrénées, les Alpes et la presqu’île de Bretagne. Souvent ils avoisinent des roches éruptives, auxquelles ils se rattachent visiblement aussi par un lien de parenté. Bien des pays classiques pour leurs richesses métalliques, comme le Cornouailles, la Hongrie et l’état de Nevada, fournissent des exemples frappans de cette dernière alliance.

C’est par leurs formes et la manière indépendante dont ils coupent les roches de toute sorte que les filons métallifères trahissent leur origine. Leur formation est due à de grandes cassures verticales, nommées failles ou paraclases, qui ont donné issue à des substances et en ont été ultérieurement remplies. La concomitance des filons et des grandes dislocations témoigne suffisamment que c’est de bas en haut, c’est-à-dire des régions profondes du globe vers la surface, que les matières métalliques et leurs gangues ont