Arrivent les deux années désastreuses, 1870 et 1871. La panique financière éclate. L’encaisse argent de la Banque tombe à 71 millions en fin d’année. La frappe s’arrête à la Monnaie ; le cours forcé des billets est inévitable, et il en résulte ce fait imprévu que, sur les cinq pays de l’Union métallique, trois font leurs affaires avec du papier. Le métal blanc a disparu de nouveau, mais non pas pour être exporté cette fois : il a peur, il se cache. Le papier de banque suffit aux gros paiemens; on remplace même la monnaie divisionnaire par des billets de 5 francs et de 2 francs.
Avec la sécurité qui renaît en 1872, le numéraire métallique reparaît. Le nouvel empire allemand, tendant naturellement à l’unité, prépare la réforme de son régime monétaire sur la base de l’étalon unique d’or. La circulation des pays germaniques était alors évaluée à 1,800 millions de francs en pièces d’argent de types divers; l’or y était très rare. L’Allemagne se débarrassa de son argent jusqu’à concurrence de 1,322 millions de francs, soit par la vente directe sur le marché de Londres, soit par les voies commerciales : ces opérations diverses coïncident avec le plein développement de la production américaine. Malgré la surabondance du métal blanc, sa valeur commerciale ne baisse que faiblement, tant qu’il est loisible de diriger les lingots vers les ateliers monétaires de France, de Belgique et d’Italie, où ils se transforment en pièces de 5 francs au cours de 15 1/2. En 1873, la frappe des écus d’argent monte à plus de 155 millions à Paris, à 112 millions à Bruxelles. Cette fabrication dépassait tout ce qu’on avait vu précédemment, et, pour la Belgique, l’exagération était telle qu’elle accusait une spéculation des plus dangereuses.
Le vice de l’Union latine fut dès lors mis en en évidence. Les gouvernemens intéressés essayèrent de réagir ; on se mit d’accord pour limiter d’abord, et bientôt après pour suspendre complètement le monnayage des pièces de 5 francs. En 1876, le ministre des finances, M. Léon Say, présenta et fit accepter une loi en ce sens. La fabrication, tolérée pendant une année encore pour épuiser les bons de monnaie délivrés à l’avance, fut définitivement prohibée dans tous les pays de l’Union. De 1870 inclusivement, jusqu’aux dernières frappes françaises de 1878, il a été monnayé chez nous une somme de 419,340,520 francs en pièces d’argent de 5 francs. Le monnayage des pièces divisionnaires, assez important pendant cette période, n’a pas augmenté le stock du métal argent, puisqu’il n’a été qu’une refonte des anciennes petites pièces dont on affaiblissait le titre.
Les obstacles mis à la fabrication des écus entraînèrent dans notre régime monétaire une réforme de grande portée, quoiqu’elle ait été peu remarquée dans le public. On supprima les ateliers départementaux,