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également droit à une augmentation progressive de leur traitement ; lorsqu’ils ont atteint cinquante ans d’âge et comptent vingt-cinq ans de services, ils ont droit, s’ils reçoivent depuis six années le traitement maximum de leur grade et qu’on ne puisse ou ne veuille pas leur donner d’avancement, à une augmentation de 20 pour 100. Dans l’Autriche cisleithane, après cinq années de services dans une même classe, le fonctionnaire a droit au traitement de la classe supérieure. En Italie, au bout de six années de services sans augmentation, les employés dont le traitement n’excède pas 7,000 francs ont droit à une augmentation d’un dixième, pourvu que les augmentations successives, cumulées avec le traitement initial, n’excèdent pas le traitement de la classe ou du grade supérieurs. Il est superflu de faire observer que l’objet de ces dispositions si diverses est le même ; il est d’améliorer progressivement la situation pécuniaire de l’employé et d’attacher des avantages certains à l’ancienneté, afin d’atténuer le désir immodéré d’avancement qui dévore le fonctionnaire français, le pousse à des démarches incessantes et vaut aux ministres de continuelles obsessions.

M. Haussmann, qui, pendant sa longue et féconde administration, avait formé à la préfecture de la Seine un personnel si remarquable par son intelligence et son dévoûment, avait résolu le même problème par un système extrêmement ingénieux qui satisfaisait les employés et le mettait lui-même à l’abri des sollicitations extérieures. Les cadres avaient été fixés et ne pouvaient varier ; le traitement minimum de chaque classe avait été déterminé. Le fonctionnaire avait droit, tous les deux ans, à une augmentation de 200 francs. Son traitement, par l’effet de ces augmentations successives, pouvait arriver non-seulement à égaler, mais à dépasser de 200 francs le traitement minimum de la classe immédiatement supérieure. On aperçoit tout de suite l’effet de ce mécanisme : le sous-chef qui, sans sollicitations et par le seul fait de l’ancienneté, était arrivé à toucher le même traitement que son chef de bureau, ne retirait aucun avantage immédiat d’une promotion, et, deux ans plus tard, il était obligé de la payer d’un sacrifice pécuniaire. La retraite était calculée sur le chiffre du dernier traitement ; le sous-chef n’avait aucun préjudice à redouter de ce côté. Le préfet était toujours maître d’avancer les employés qui se distinguaient par leur mérite ; pour les autres, les avantages qui pouvaient résulter de l’avancement s’atténuaient d’année en année. Les fonctionnaires de la préfecture de la Seine prenaient d’autant plus aisément patience que leur situation n’était pas stationnaire, et que, par l’effet des augmentations bisannuelles, elle ne tardait pas à devenir