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avancée. Italia fara da se. Aucune distinction entre les effets commerciaux et les effets agricoles : qu’il soit souscrit par un cultivateur ou par un négociant, l’effet à ordre a la même valeur, entraîne la même responsabilité, la même procédure expéditive. La plupart des sociétés de crédit mutuel sont en quelque sorte adossées à une caisse d’épargne, se confondent avec elle ; l’argent des membres déposans sert à faire des prêts aux autres membres, si bien que la société joue vis-à-vis d’eux le rôle de maître Jacques, tantôt créancière et tantôt débitrice ou dépositaire. Vous avez le choix entre le livret nominatif ou le livret au porteur, et celui qui présente ce dernier est considéré comme mandataire régulier de la personne au nom de laquelle le livret est inscrit. Si vous agissez comme déposant au nom de plusieurs, on ne vous demandera ni acte de société, ni pouvoir pour retirer l’argent. À la succursale de Magenta, M. Léon Say vit une jeune fille apportant une somme de 9 francs au nom d’une société composée de quatre de ses amies et de cinq garçons qui se cotisent et donnent 1 franc par semaine pour faire une excursion. D’ordinaire la somme prêtée ou escomptée ne peut dépasser 80 à 200 fr. ; pour les prêts importans, on en réfère à la banque centrale. On ne prête qu’aux sociétaires, tous triés sur le volet, bien connus par conséquent et ayant un petit capital, puisqu’ils sont actionnaires. La Banque agricole milanaise a 906 membres, un capital de 238,200 fr. un portefeuille de 7,120,000 francs d’effets.

Un trait particulier de l’économie publique italienne, c’est l’autonomie de la caisse d’épargne. Qu’il s’agisse de la grande caisse d’épargne de Milan, qui a 280 millions de francs de dépôts, ou des petites sociétés agricoles, toutes restent entre les mains d’administrations privées. Au lieu d’alimenter la dette flottante, les grands travaux de l’état, leurs capitaux demeurent là où ils ont été produits, fécondant de nouveau le travail d’où ils sortent, remplissant en même temps l’office de canaux de drainage et d’irrigation. L’état n’a pas, comme en France, la gestion des fonds ni la responsabilité ; un ministère à bout de ressources n’y saurait puiser à pleines mains pour dissimuler ses gaspillages et retarder des emprunts inévitables. On a défini la caisse d’épargne de Milan : un grand banquier privé qui fait toutes les affaires de banque, prête sur marchandises et sur hypothèques, et qui est un crédit foncier en même temps qu’une banque d’escompte. Elle sert un intérêt de 3 1/2 pour 100 aux livrets au porteur, de 4 pour 100 aux livrets nominatifs, mais ne délivre ceux-ci qu’aux agriculteurs qui travaillent la terre de leurs mains, aux ouvriers, artisans et gens de métier ; tandis que la Banque de France ne sert pas d’intérêts à ses déposans pour pouvoir en donner aux actionnaires, ces banques italiennes donnent un intérêt aux déposans et aucun dividende aux