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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 83.djvu/725

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ce budget la présentation de lois spéciales ayant pour objet des réformes fiscales, et notamment la réforme de la législation sur les boissons. Il est clair que M. Rouvier compte, pour l’établissement ultérieur d’un équilibre budgétaire réel, sur un remaniement profond du régime des alcools, et il a chargé une commission d’étudier rapidement les questions se rattachant à cette réforme. Mais le résultat des travaux de cette commission ne pourra, de toute façon, avoir d’influence que sur l’élaboration de budget de 1889. Quant au budget extraordinaire de 1888, qui ne comprend plus que des dépenses pour la guerre et pour la marine, il est fixé à 100 millions (84 pour le premier de ces départemens, 16 pour le second), ce qui constitue une diminution de 22 millions sur le projet de budget rectifié présenté par M. Rouvier peu de temps après son arrivée aux affaires, et de 82 millions sur les propositions primitives de M. Dauphin.

Le ministre des finances n’a pas dit à l’aide de quelles ressources il comptait proposer de couvrir ces dépenses extraordinaires. Il s’est contenté d’assurer que les moyens financiers auxquels il projetait d’avoir recours n’auraient pas d’action défavorable sur l’économie du budget ordinaire. On en a conclu, non sans de plausibles apparences de raison, que M. Rouvier préparait une opération de conversion portant sur le 4 1/2 pour 100 ancien, dont le service d’intérêt exige une annuité un peu supérieure à 37 millions. La conversion sera-t-elle faite en 3 pour 100 avec soulte, ce qui élèverait le montant nominal de la dette, maintiendrait l’annuité d’intérêt au niveau actuel, et mettrait à la disposition du trésor une somme évaluée à 120 ou 150 millions, ou bien l’opération consistera-t-elle en une simple réduction de l’intérêt de 4 1/2 pour 100 à 4 pour 100, produisant une économie annuelle qui servirait de gage à une émission d’obligations à court terme? Les avis sont partagés, et peut-être même le ministre n’a-t-il arrêté lui-même aucune décision à cet égard.

Si la conversion était faite en rente 3 pour 100, le marché aurait à se garer contre un afflux de nouveaux titres de rente perpétuelle. Les spéculateurs haussiers ne se sont pas laissé intimider par cette perspective, dont quelques vendeurs ont cherché timidement à jouer. Le 3 pour 100 a été porté de 81.20 à 81.75, l’amortissable de 85 à 85.45, et le 4 1/2 de 108.82 à 100.12. Les fonds étrangers s’associaient avec plus ou moins de vivacité à ce mouvement de reprise, et sur un assez grand nombre de valeurs la spéculation entreprenait de commencer la réalisation des prévisions de hausse.

Les choses en étaient là à la fin de la semaine dernière, lorsque se répandit dans la soirée du dimanche 25 la nouvelle du tragique incident de Raon-sur-Plaine. L’émotion a été vive au premier instant sur le marché financier. D’importantes positions venaient d’être prises en vue d’un mouvement d’amélioration ; des vendeurs de primes débordées