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autres moyens seront épuisés ! Il me semble que c’est le seul rôle qui convienne au roi Ferdinand. Je ne conçois pas comment l’Autriche pourrait vouloir lui en tracer un autre qui, en le déshonorant, reverserait aussi une partie de la honte sur ceux qui seraient censés l’avoir imposée. » Il prévoit que la mission qu’on veut confiera une armée autrichienne pour le rétablissement du despotisme à Naples est très propre à provoquer le soulèvement de l’Italie tout entière. Il démêle très bien que la question qui s’agite dans la péninsule est plus nationale encore que libérale : on y déteste la domination ou l’influence autrichienne plus encore qu’on n’y désire des constitutions.


Certes, continue-t-il, ce n’est pas ainsi qu’on rétablira, d’une manière solide, l’ordre et la paix dans cette belle contrée, et je plains vivement les gouvernemens et les peuples. Le sort qui les attend sera bien malheureux. Quel rôle le roi de Naples va-t-il jouer dans cette circonstance ? Va-t-il déclarer que tout ce qu’il a fait lui a été arraché par la violence ? Proclamera-t-il à la face de l’Europe que toutes les promesses qu’il a faites au moment de son départ n’avaient pour but que de mettre un peu plus tôt sa personne en sûreté ? Je répugne à croire tant de bassesses. Si cela avait lieu, la royauté serait frappée partout, et nous en ressentirions vivement le contre-coup… J’espère que vous parviendrez à persuader à l’Autriche de tolérer à Naples quelques institutions sans lesquelles il me paraît impossible que cette famille puisse régner.


Alexandre fait la sourde oreille aux sages conseils de Richelieu ; et, en effet, l’invasion d’une armée autrichienne en Italie provoque le soulèvement du Piémont ; le roi de Naples est rétabli, mais après s’être déshonoré et en subissant la dure tutelle de la cour de Vienne. Même en Espagne, la « fierté castillane » se raidit contre les menaces de la sainte-alliance, et la révolution s’y accentue. Alexandre ne s’en montre que plus obstiné. Il réserve à la France, en Espagne, le rôle que vient de jouer l’Autriche en Italie. Il est intéressant de voir l’ancien gouverneur d’Odessa, l’ancien serviteur d’Alexandre, se montrer beaucoup moins docile à la direction de la Russie que ne le seront plus tard les Villèle, les Chateaubriand et les Mathieu de Montmorency. Sa réponse est même très nette : « Je suis convaincu qu’une pareille tentative aurait pour la maison de Bourbon les mêmes résultats qu’a eus la guerre d’Espagne pour Buonaparte, avec cette différence que, dans ce cas, la chose irait bien plus vite… Je regarderais comme traître à sa conscience, à ses devoirs, celui qui la conseillerait et qui s’y prêterait. » On voit combien Richelieu fut plus sage que ses successeurs. Pour lui, en Espagne aussi