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Page:Revue des Deux Mondes - 1887 - tome 84.djvu/716

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dit aujourd’hui, et ils ne nommaient pas moins, il y a quelques années, M. Wilson rapporteur-général du budget, sans doute afin de lui donner plus d’autorité ou de facilité pour exercer son influence et distribuer ses faveurs. Ils n’ignoraient pas non plus apparemment que M. Grévy était le beau-père de M. Wilson ; ils connaissaient ses habitudes, ses familiarités, ses relations, ses faiblesses, et ils n’ont pas moins, il y a un an, renouvelé son septennat. Ils savaient tout, et quand ils accusent aujourd’hui M. le président de la république, c’est eux-mêmes, c’est leur complicité ou leur silence qu’ils accusent en même temps. M. Grévy a sans doute le malheur d’être le beau-père du correspondant de femmes suspectes. Il a commis bien d’autres fautes encore, surtout celle de n’avoir pas vu que le travail de désorganisation universelle, de destruction auquel il se prêtait, finirait par arriver jusqu’à lui. Il expie aujourd’hui, un peu durement, non sans une certaine justice toutefois, son imprévoyance. Ceux qui l’accusent, les républicains qui l’accablent montrent leur inconsistance, et le plus clair est que les uns et les autres, par leurs connivences, par leurs aveuglement, ont contribué à cette crise où tout s’effondre où pour le moment M. Jules Grévy seul s’en va sans gloire, sinon sans bruit.

Et maintenant il faudrait sortir, si c’était possible, de ce gigantesque imbroglio. La succession de M. Grévy est ouverte, il l’a déclaré dans ses entretiens, il va le déclarer dans un message, c’est entendu ; on ne pourrait essayer de le retenir sans tomber dans le ridicule. Par qui sera-t-il remplacé à l’Elysée ? Quelle sera la signification de cette élection présidentielle, dénoûment improvisé d’une crise qu’il faut bien appeler révolutionnaire ? Les candidats se pressent et se mêlent, M. Jules Ferry, M. de Freycinet, M. Floquet, M. Brisson ; ils ont tous leurs partisans, leurs adversaires, sans avoir naturellement les mêmes chances. La lutte est engagée passionnément, furieusement, entre grands électeurs, et il n’est pas jusqu’à M. Déroulède qui ne s’en mêle, allant au Palais-Bourbon signifier ses volontés, menaçant, si on ne s’arrête pas devant son veto, de descendre dans la rue à la tête d’une formidable armée de patriotes et de socialistes ! C’est l’élément baroque du drame électoral ; mais comme M. Déroulède n’est pas un dictateur imposant ses volontés, et qu’il faut être sérieux, le problème du scrutin reste ce qu’il est Quel sera l’élu du congrès qui va se réunir ces jours prochains à Versailles ? Avant tout, se sont hâtés de dire les républicains orthodoxes, la première condition est d’en finir avec les divisions, de recourir à la recette merveilleuse et infaillible de la concentration. Pourvu que la droite soit exclue de toutes les combinaisons et que tout se passe entre républicains, c’est l’essentiel » le reste sera ce qu’il pourra ! Et quand la droite serait exclue de tout, même de la chambre, quand, par un miracle qui ne semble pas près de s’opérer,