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Tel est, en quelques mots, le mécanisme de cette œuvre législative. Elle porte, dans presque toutes ses dispositions, l’empreinte de l’homme qui l’a conçue, pétrie, imposée. C’est du socialisme! a-t-on dit en-deçà comme au-delà du Rhin. Cette objection n’a pas gêné M. de Bismarck, et peut-être ne lui a-t-elle pas déplu. L’exposé des motifs du deuxième projet de loi sur l’assurance contre les accidens déclare hardiment que l’état est, entre autres choses, une institution de bienfaisance. Dans la discussion de la loi sur l’assurance contre les maladies, le commissaire du gouvernement énumère avec complaisance les diverses restrictions apportées depuis quelques années à la liberté du travail, et se félicite hautement de ce que le projet soumis au Reichstag sape une fois de plus « ce principe fondamental de l’état économique moderne. » Ajoutons qu’une législation pareille est un excellent moyen d’influence électorale, et que, maniée avec dextérité, elle peut devenir, par exemple dan? les pays annexés, un instrument redoutable de propagande politique; nous aurons fait connaître toute la pensée du grand chancelier.

En Italie, le législateur, tout en donnant aux ouvriers un témoignage éclatant de sa sollicitude, n’a pas procédé de la même manière. Il a simplement approuvé une convention passée, le 8 février 1883, entre le ministre du commerce et les caisses d’épargne de Milan, de Turin, de Bologne, de Rome, de Venise, de Cagliari, le « monte dei Paschi, » à Sienne, le mont-de-piété et la caisse d’épargne de Gênes, la banque de Naples, la banque de Sicile, pour fonder « une caisse nationale en vue d’assurer les ouvriers contre les accidens auxquels ils sont exposés dans leurs travaux, » autorisant en outre cette caisse à se servir gratuitement des caisses d’épargne postales pour l’établissement des contrats d’assurance et pour tous les actes qui s’y rattachent, y compris les recouvremens de primes et les paiemens d’indemnités. Cette caisse constitue une personne morale autonome, administrée par le comité exécutif de la caisse d’épargne de Milan. Un conseil supérieur, composé des membres de ce comité et d’un représentant de chacun des établissemens signataires, détermine la marche générale de l’administration, délibère sur la réforme éventuelle des tarifs, établit les règles suivant lesquelles chacun des établissemens fondateurs doit procéder à la vérification de l’accident et à la liquidation des indemnités. Le fonds de la caisse nationale est composé des primes d’assurance, du revenu des capitaux employés, des legs, des dons et de tous autres produits éventuels ou volontaires. « Peuvent être assurées, dit l’article 8 de la convention, toutes personnes résidant dans le royaume, ayant atteint l’âge de dix ans, qui se livrent à des