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Le roi des Francs reparut dans l’été de l’an 756. De nouveau, il assiégea Pavie. De nouveau, Astaulf promit ce qu’on lui demanda; mais un commissaire franc procéda, cette fois, à l’exécution du traité. Les clés de vingt-deux villes furent remises entre les mains du pape. Les Lombards semblèrent alors avouer leur impuissance. A la mort d’Astaulf, deux compétiteurs se disputèrent sa succession : Didier, le candidat préféré du pape, l’emporta. Désormais le roi des Lombards n’est plus que le client du pontife et le vassal des Francs. Aussi les derniers jours d’Etienne furent-ils heureux. Il mourut en avril 757, quelques semaines après avoir adressé à Pépin un cantique d’actions de grâces. Quel changement, disait-il, accompli en une seule année : « Le soir, c’étaient les larmes ; au matin, c’est la joie! »

Quel changement, en effet! Essayons d’en mesurer la grandeur et de comprendre la révolution qui venait de s’accomplir.


III.

En 753, le pape, par mandat de l’empereur, est allé sommer Astaulf dans Pavie de restituer ses conquêtes. A qui? A l’empereur évidemment. Sur le refus du Lombard, Etienne se rend auprès de Pépin. Le silentiaire byzantin a, sans doute, approuvé ce voyage. Il devait trouver tout naturel que l’évêque de Rome, serviteur de son maître, allât requérir les services des Francs contre les Lombards. Employer barbares contre barbares, c’était une vieille tradition de la politique impériale. Jusqu’ici, tout est simple. Mais c’est le pape qui a conçu le dessein d’aller en Gaule, ou plutôt « la divine Providence le lui a inspiré. » Quand il se sépare de l’ambassadeur Jean et des députés laïques du peuple de Rome, pour s’en aller avec son clergé, ses évêques, ses clercs et ses moines, c’est sa propre fortune qu’il cherche par-delà les grands fleuves débordés et les montagnes atroces. Si mal renseignés que nous soyons sur l’entrevue dans l’oratoire de Pontion, nous savons qu’Etienne a obtenu une promesse écrite de donation. A qui? A saint Pierre. Pendant le premier siège de Pavie, Astaulf a promis de restituer les villes impériales. A qui? A saint Pierre. Après la seconde guerre d’Italie, les clés et les étendards des villes ont été remis par le commissaire franc au pape. Pour les recevoir, un ambassadeur impérial, le secrétaire George, avait tendu la main. Il avait « promis à Pépin de riches présens, s’il voulait remettre sous la domination impériale Ravenne et les autres villes et châteaux de l’exarchat;.. mais le serviteur de Dieu, le très doux roi, déclara