espagnols, que la reine trouverait moyen de contenter M. le prince, et que les églises paieraient pour les grands. Il répondait à Condé, qui l’exhortait à venir faire campagne avec lui, qu’il ne voulait pas aller « au précipice. » Il écrivait à MM. de La Rochelle : « Mes amis, la mémoire des roys est grande pour se souvenir du passé… Soit rebelle qui voudra au roy, mais soyez-lui fidelles ;.. batte la campagne qui voudra pour ruiner ses sujets, mais tenez-vous chez vous[1], »
L’assemblée, rendue à Nîmes, eut ordre du roi de se transporter à Montpellier, mais se refusa à le faire et se rendit plus tard, sans permission, à La Rochelle. Lesdiguières resta pourtant en rapport avec l’assemblée, et continua à lui envoyer des avis qui n’étaient ni demandés ni suivis.
Pendant l’année 1614, Lesdiguières alla visiter le duc de Savoie à Turin, et y fut magnifiquement accueilli. On fit démolir pour lui la porte de Suze, qui était toujours restée murée depuis l’arrivée de l’infante d’Espagne, la femme de Charles-Emmanuel. Il promit de tenir la main à l’accomplissement du traité conclu à Asti, et de secourir le Piémont, si besoin était, contre les entreprises du gouverneur de Milan. À son retour, feignant de craindre une invasion espagnole du côté de la Bresse, il fit des levées pour le service du duc de Savoie à Embrun et à Gap, tout en ayant l’air de rester neutre. Il avait pris très à cœur les intérêts du duc et les défendait chaudement contre la cour, qui penchait toujours pour les Espagnols. La lutte était bien inégale entre ces derniers et le duc, et Lesdiguières était bien inspiré quand il montrait dans ses lettres l’importance pour la France de la conservation des états du prince qui tenait les clés des Alpes sur le Dauphiné. Il ne craignit pas, au risque d’être désavoué, de passer les monts pour « essayer de mettre ledict duc un petit peu plus au large qu’il n’est à présent[2].» À la reine mère, il écrivait : « Voyant que le mal empire et que je n’ai aucune réponse de Leurs Majestés, je me suis résolu de passer les monts sans craindre la rigueur de ceste saison, pour empêcher, comme j’espère, la continuation des progrès dudict gouverneur (de Milan). »
Lesdiguières, il faut l’avouer, agissait plutôt en prince souverain qu’en gouverneur du Languedoc et simple serviteur du roi. On lui dépêcha des courriers pour lui mander qu’on ne pouvait approuver qu’il passât les Alpes pour aller en Piémont et pour le prier de s’en revenir en Dauphiné. Il répondait au roi : « j’ay toujours creu