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colonel de Lourmel s’appliqua, pendant le mois de juin, aux travaux de la route; 1,500 hommes y étaient employés tous les jours; le 24 juin, 51 kilomètres étaient achevés. Une pyramide, élevée par le génie auprès d’Aïn-Raoua, consacra le souvenir des chefs et des corps qui avaient exécuté ce grand labeur.

Pendant cette expédition de Sétif à Bougie, le général de Saint-Arnaud, successeur du général Herbillon au commandement de la division de Constantine, avait visité dans l’est de la province le vaste territoire des Nemencha, dans le sud l’Aurès et les oasis.

En somme, la campagne de 1850, à peu près nulle dans la province d’Alger, toute d’observation dans la province d’Oran, où le général de Mac-Mahon exerçait, tout le long de la frontière marocaine, une surveillance incessante, n’avait eu un peu d’intérêt que dans la province de Constantine. Quand, le U novembre, le général d’Hautpoul, nommé à la place du général Charon gouverneur dei l’Algérie, reçut de son prédécesseur la direction suprême des affaires, jamais transmission de pouvoir ne s’était accomplie dans un temps aussi calme.


VII.

Le général d’Hautpoul, qui venait d’occuper, une année durant, le ministère de la guerre, était arrivé en Algérie avec des idées moins paisibles. Il eût été fier de signaler son gouvernement par l’annexion de la Grande Kabylie; il avait arrêté ses plans en conséquence, et, pour les faire agréer au gouvernement, il fit partir pour Paris, au mois de février 1851, le lieutenant-colonel Durrieu. L’état général des affaires n’était pas alors favorable à une aussi grande entreprise. Le désaccord évident dès cette époque entre le président de la république et l’assemblée législative avait rendu celle-ci défiante ; elle n’était rien moins que disposée à voter le surcroît d’effectif et d’argent que les projets du général d’Hautpoul auraient rendu nécessaire. Une sorte de transaction proposée par le général Randon, ministre de la guerre, soutenue par La Moricière, Bedeau, Cavaignac et Charras, fut acceptée par l’assemblée, non sans peine. Il n’était plus question de la Grande Kabylie ; c’était contre la Petite qu’une expédition était autorisée dans la mesure que permettaient les ressources ordinaires de l’armée d’Afrique.

Dès le 15 mars, le ministre fit parvenir au gouverneur-général des instructions qui lui prescrivaient de préparer, pour le commencement de mai, la formation d’une colonne de 8,000 hommes, et lui indiquaient pour objectif principal le débloquement de Djidjeli. Le général d’Hautpoul, membre de l’assemblée législative, ne