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oxygène, hydrogène, carbone ; — puis trois métaux jouant un rôle essentiel : potassium, calcium, fer ; — puis encore trois métalloïdes : azote, phosphore et chlore, et enfin trois autres métaux : sodium, magnésium, aluminium, six élémens dont l’importance est bien moindre, sauf peut-être les deux premiers, empruntés, comme le potassium, soit à un engrais quelconque, soit aux élémens fertilisans du sol[1].

De semblables indications sont bien trop sèches et absolues pour présenter quelque intérêt. Abordons sans plus tarder l’examen des résultats fournis par l’analyse « immédiate » qui recherche les principes chimiquement définis, toujours identiques à eux-mêmes et de composition invariable. Nous apprenons que l’eau et l’alcool dominent dans les vins : tout le monde eût pu le dire à notre place. Puis viennent, toujours par ordre pondéral décroissant, la glycérine, les matières colorantes, l’acide tartrique libre ou combiné.

Limitons provisoirement notre énumération, pour faire observer que, si la saveur du cru d’Argenteuil diffère énormément de celle du Château-Margaux, la constitution chimique du premier ne se confond pas avec celle du second des deux vins. Aucun vigneron n’osera soutenir que le vin qu’il décuve chaque automne est constamment semblable à lui-même sous tous les rapports. Enfin on sait qu’un vin gagne, perd ou se modifie en vieillissant ou en voyageant. Mais toujours les opérations chimiques conduisent à des résultats qui s’harmonisent avec les épreuves de la dégustation. Autre goût, autre composition, et quand les principes restent les mêmes, les doses reconnues fléchissent ou se relèvent. Le vin est loin d’être une association bien définie de composés invariables, comme l’eau de mer ; ce n’est pas même, comme le fait de vache, par exemple, une mixture où l’analyse retrouve presque toujours les mêmes dérivés réunis suivant des rapports assez peu différens et généralement groupés autour d’une moyenne connue.

Lorsque, il y a plusieurs années, nous parlions ici des propriétés chimiques de l’eau de mer, nous faisions observer que les dosages des chimistes avaient beau être précis, ils n’apprenaient et ne pouvaient apprendre qu’une chose : dans un litre de liquide, il existe tant de grammes de chlore, de brome, d’acide sulfurique, de potassium, de sodium, de calcium. En revanche, disions-nous, il est absolument impossible d’indiquer au juste dans quel rapport ces corps simples ou ces radicaux sont associés entre eux. Mais la difficulté

  1. Un chimiste théoricien aurait le droit de faire ressortir le parallélisme frappant qui règne entre les termes de même ordre des deux groupes métalliques que nous venons de mentionner.