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d’être proférée par le gouvernement lui-même, devant un parlement un peu étonné de cette hardiesse : c’est l’Espagne. La parole est assez rare et vaut, certes, d’être recueillie. Le chef du cabinet espagnol n’est peut-être pas arrivé de propos délibéré ou par de longues réflexions à prendre une initiative, qui a été une sorte de coup de théâtre. Le fait est que le président du conseil de Madrid, M. Sagasta, est, depuis quelque temps, dans une situation assez embarrassée. Ayant à faire face, avec une majorité incohérente, et aux réformes militaires dont le général Cassola s’est fait le bruyant promoteur, et aux difficultés croissantes d’une crise économique et financière des plus graves. Pressé et menacé de tous côtés, il a pris le parti de tenter une diversion hardie. Il n’a pas craint de déclarer que l’Espagne devait se garder de suivre les mauvais exemples de l’Europe, qu’elle n’avait besoin, pour sa part, que d’une armée limitée pour sa protection, qu’il y avait, d’ailleurs, à choisir entre les économies et une paix armée ruineuse, entre l’équilibre du budget et l’extension démesurée, inutile, des forces militaires. Qu’en sera-t-il de tout cela ? Au premier moment, M. Sagasta, par son langage, a visiblement déconcerté ses adversaires, troublé quelques-uns de ses amis eux-mêmes et surpris tout le monde. Ce n’est peut-être pas sans peine que le président du conseil réussira à faire accepter cette politique nouvelle. Le mot est dit néanmoins, et l’idée de M. Sagasta est d’autant plus séduisante que l’Espagne peut assurément réduire ses dépenses militaires sans avoir rien à craindre ni pour sa sécurité ni pour sa dignité.

Ch. de Mazade.




LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE.




La Bourse a salué par un mouvement de hausse la chute du cabinet Floquet, survenue au milieu du mois. Le public financier n’a pas partagé les craintes qu’éprouvèrent à cette occasion certains cercles politiques, et l’attitude de la spéculation a été en contradiction constante avec les appréciations de la plupart des organes de la presse. Aussi longtemps que la crise ministérielle a duré, les cours du 3 pour 100 se sont élevés lentement jusqu’à dépasser 84 francs. Après la constitution