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guerres de la Vendée, ne lui répondit que par des imprécations contre la gabelle. Un vieillard, à qui mon père, dans mon enfance, faisait des questions semblables, lui parla de la guerre de Sept Ans, à laquelle il avait assisté. C’était la seule qu’il voulût se rappeler.

Nous ne trouvons, sous le régime censitaire des deux monarchies de 1814 et de 1830, aucune manifestation publique des sentimens politiques du paysan Vendéen. Ils furent, on n’en saurait douter, plus favorables à la première qu’à la seconde, non pour des raisons de pure politique, mais parce que la restauration avait été une victoire et la révolution de Juillet une défaite pour l’influence du clergé. Le clergé subit une nouvelle défaite en 1848, malgré certaines avances des vainqueurs, et la bonne grâce apparente avec laquelle il se prête à la bénédiction des arbres de la liberté ne trompe que ceux qui voulaient bien se laisser tromper. Il prit ou crut prendre sa revanche après le coup d’état de 1851. Sous l’impulsion de ses guides spirituels, le paysan Vendéen vote tour à tour pour des candidats royalistes en 1848 et en 1849, pour des candidats impérialistes de 1852 à 1870. Un seul candidat royaliste, dans cette dernière période, réussit à se faire nommer dans tout le pays vendéen : c’est en Maine-et-Loire, dans les Mauges, M. le comte de Durfort-Civrac, esprit d’ailleurs libéral et pondéré, vrai type du galant homme encore plus que du gentilhomme, à qui ses électeurs restèrent fidèles sous la république comme sous l’empire. Après 1859, la question romaine détache de l’empire une partie du clergé. Le moment paraît venu de ressusciter en Vendée des candidatures d’opposition royaliste ou cléricale. M. de Falloux se présente et se fait battre dans l’arrondissement des Sables-d’Olonne ; M. Keller, dans celui de La Roche-sur-Yon ; M. le marquis de La Rochejaquelein, dans, celui de Bressuire. Le pouvoir temporel du pape ne touche pas les paysans et n’intéresse qu’à moitié le bas clergé, envers qui le gouvernement impérial reste prodigue de faveurs. Il s’abstient ou intervient mollement dans la lutte. Sa nouvelle attitude n’a pour effet que de nuire aux candidatures officielles, sans sauver les candidatures proprement catholiques. Si un candidat d’opposition est élu en Vendée, dans l’arrondissement de La Roche-sur-Yon, qui appartient tout entier au bocage, c’est un libéral, d’origine révolutionnaire, petit-fils d’un conventionnel, le baron Alquier. Le suffrage universel a de ces reviremens. Il en a eu de semblables depuis dix-huit ans. Si l’influence du clergé, restée prépondérante, s’est mise de nouveau au service du parti royaliste et lui a assuré une série de victoires, elle n’a pu empêcher des élections républicaines : dans le département de la Vendée tout entier, en 1S71 ; dans l’arrondissement de La Roche-sur-Yon, en 1876 et en 1878 ; dans l’arrondissement de