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Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/190

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A TRAVERS L'EXPOSITION
AUX PORTES. — LA TOUR

Voici le moment de l’année où se réveille le nomade qui dort on chacun de nous ; depuis le petit nomade, celui qui déménage à la Celle-Saint-Cloud, jusqu’au grand nomade que les paquebots emmènent autour de la planète. Chacun fuit son logis et sa peine accoutumée ; un instinct obscur nous pousse à chercher un coin de monde inconnu ; nous l’imaginons charmant, et il le sera un instant, parce que la figure des choses n’y est pas encore associée aux vieux soucis que nous y portons. Oui, ce serait l’heure d’aller revoir si d’aventure l’Orient ou la Russie n’ont pas changé. Mais à quoi bon partir cette année ? Le monde est venu à nous. Des dieux bienfaisans ont réduit la grosse boule et l’ont roulée sur les bords de la Seine ; ils ont échantillonné l’univers sous nos yeux. Du temps où les Juifs erraient et où ils ne possédaient que cinq sous, il y en avait un qui faisait perpétuellement le tour du monde avec cette somme. Pour ces mêmes cinq sous, chacun peut refaire aujourd’hui l’itinéraire éternel d’Isaac Laquedem, des Invalides au Champ de Mars, dans les wagonnets de M. Decauville.

Ce sera donc là que nous irons voyager durant l’été du centenaire. Les notes recueillies en chemin, je les rapporterai, chaque quinzaine, aux amis inconnus qui voulurent bien me suivre souvent sur des routes plus lointaines. S’ils réclament un cicérone complet, technique, informé, qu’ils ne lisent pas plus avant ; ils ne trouveraient point ici leur homme. Je vais promener