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avertit lui-même les fidèles de son diocèse ; mais il se hâte d’ajouter que le mérite de cette heureuse conclusion appartient tout entier à la reine, « dont la prudence a veillé pour assurer notre repos. »

Richelieu ne perd, on le voit, aucune occasion d’affirmer sa fidélité à la cause de la régente. C’est à titre de royaliste avéré qu’il fut choisi pour représenter à Paris le clergé de la province.


L’occasion était guettée par lui depuis longtemps. Avant même que les lettres de convocation fussent lancées, un de ses amis, aposté dans la chancellerie, avait envoyé à M. de Bouthillier un double du projet de rédaction de ces lettres : « Voici ce que je vous ai promis, écrivait cet affidé ; vous en savez l’importance qui fera que vous le tiendrez secret, comme je vous en prie. »

Ainsi, Richelieu avait pu lire avant tout le monde, non-seulement la lettre du roi aux baillis et sénéchaux, lettre purement officielle, et toute de formules, mais celle de la reine-régente. Il avait pu voir que les états étaient convoqués pour le mois de septembre en la ville de Sens, que les baillis étaient invités non-seulement à présider l’élection, mais à la surveiller de très près. « Je vous prie, disait la reine, de vouloir bien exhorter les uns et les autres d’apporter en cette action un esprit de paix et d’obéissance avec une bonne inclination et entière disposition de n’avoir autre but que celui que de bons et fidèles sujets doivent porter à ces occasions. Vous prendrez aussi soigneusement garde et avertirez ceux que vous estimez être à propos, à ce que le choix et l’élection de ceux qui, doivent être députés soient faits de personnages d’honneur qui soient recommandâmes tant par leur probité et intégrité que pour leur affection au service du roi, mondit sieur et fils, et au bien et au repos de ses sujets. »

Richelieu, prévenu à l’avance, pouvait préparer ses batteries. Pour qui savait lire entre les lignes, il était clair que la « candidature officielle » allait faire jouer tous ses ressorts.

Quelques jours après (23 juin 1614), l’évêque de Luçon reçut du duc de Sully, gouverneur de Poitiers, l’ordre officiel de convocation des trois ordres de son diocèse : « Vous tiendrez, s’il vous plaît, la main, écrivait le vieux huguenot disgracié, à ce que toutes choses se fassent avec douceur ; et, en tant que vous pourrez, qu’il soit député une personne de chacun ordre, de probité, qualité, et pouvoir suffisant et convenable au sujet… Votre piété et affection au service du roi me fait espérer que vous les témoignerez tout entières en une si importante occurrence… Je vous prie de croire, ajoutait-il