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Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 94.djvu/751

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de laisser le champ libre aux travaux qu’exigeraient la restauration et l’achèvement du palais dans un coin duquel on l’avait établi un peu à l’aventure. Mais où trouver un monument approprié d’avance aux services qu’il s’agissait d’installer ? Comment, à moins de les construire tout exprès, mettre à la disposition de l’Institut des murs qui ne fussent en désaccord, ni par trop de faste avec le caractère d’un établissement scientifique, ni par trop de simplicité avec l’importance des hommes et des travaux qu’ils auraient à abriter ? Faute de mieux, on s’accommoda de l’ancien collège des Quatre-Nations que son aspect monumental et sa situation à proximité d’autres grands édifices publics semblaient, malgré les inconvéniens des distributions intérieures, rendre digne de la haute destination qu’on prenait le parti de lui donner[1]. Un architecte qui devait, vingt ans plus tard, devenir membre de l’Académie des beaux-arts, M. Vandoyer, fut chargé de transformer en salle de séances publiques l’ancienne église du collège et d’utiliser les autres bâtimens de manière à y aménager, outre des pièces réservées à chacune des quatre classes, une bibliothèque spéciale, indépendante de la bibliothèque Mazarine et exclusivement à l’usage des membres de ! l’Institut, des bureaux pour le secrétariat, enfin des salles de diverses grandeurs, tant pour les concours annuels des aspirans aux prix de Rome que pour les études quotidiennes des élevés admis à dessiner ou à modeler d’après le modèle vivant, sous la direction de professeurs pris dans le sein de la classe des beaux-arts[2].

  1. On sait que le collège des Quatre-Nations ou collège Mazarin, fondé par les héritiers de Mazarin en exécution d’une de ses dernières volontés, était destiné à recevoir soixante élèves originaires des provinces limitrophes de l’Italie, de l’Allemagne, de la Flandre et de l’Espagne conquises sous le ministère du cardinal. Le collège des Quatre-Nations conserva sa destination jusqu’à la Révolution. À cette époque, il fut converti en prison pour dettes ; un comité révolutionnaire y tint ensuite ses séances, et, lors de la réorganisation générale de l’instruction publique, une des écoles centrales supérieures créées par la Convention y fut momentanément installée. Enfin, après avoir été, en 1801, affecté à l’École des beaux-arts, l’ancien collège des Quatre-Nations fut attribué à l’Institut de France par un décret en date du 10 ventôse an XIII (1er mars 1805).
  2. Sans être, à proprement parler, un corps enseignant, comme l’avait été l’ancienne Académie royale de peinture, la quatrième classe de l’Institut ne se trouvait pas pour cela privée de toute influence sur l’éducation des jeunes artistes. Cette influence, elle l’exerçait par le choix même de ceux de ses membres qu’elle jugeait bon d’appeler à ces fonctions de professeur et que, jusqu’en 1863, elle continua de désigner aux ministres à qui appartenait le droit de nomination définitive : mais son rôle en matière d’enseignement officiel ne s’étendait pas au-delà de cette intervention indirecte. C’est donc bien à tort qu’on le confond assez ordinairement avec la fonction, indépendante en réalité, et les attributions toutes spéciales de l’École des beaux-arts. Cette école n’a jamais été et n’est pas plus une annexe de l’Académie des beaux-arts que l’École polytechnique ne relève de l’Académie des sciences ou l’École de droit de l’Académie des sciences morales. Seule, l’Académie de France à Rome est sous le patronage légal et sous l’autorité immédiate de l’Académie des beaux-arts.