d’août. Prenez la peine, au surplus, d’y regarder d’un peu près : tous les critiques, de nos jours même, qui réclament le droit de nous informer d’eux et de leurs goûts personnels à l’occasion d’une comédie de M. Dumas ou d’un roman de M. Zola, c’est qu’ils nourrissent, tout au fond d’eux, une ambition timide ou un rêve avorté d’auteur dramatique ou de romancier. Faute de mieux, ils ont pu consentir à se rabattre sur la critique, mais ils y portent ce besoin d’étalage d’eux-mêmes, qu’en vérité je ne leur reproche qu’autant qu’au lieu de le traduire en vers, ils le manifestent en prose. La raison n’en est-elle pas bien simple ? Personne de nous, c’est la loi du genre ou la règle du jeu, n’a le droit de supposer que, lorsqu’il promet de parler de Molière ou de Racine, ce soit à lui, qui en parle, et non pas à l’auteur d’Andromaque ou à celui de l’École des femmes que l’on coure. Mais si l’on entend dire aujourd’hui qu’il n’y a plus de critique, c’est qu’en attendant qu’il en eût effacé jusqu’au nom, il n’a pas dépendu du Romantisme qu’il corrompît, qu’il dénaturât, qu’il supprimât la chose.
Il en aurait fait autant de l’histoire si, tandis qu’aux environs de 1830 le talent en critique était tout entier du côté des romantiques, au contraire, en histoire, de puissantes influences, opposées et adverses, — l’influence de Thiers, de Guizot, d’Alexis de Tocqueville, — n’avaient contrebalancé celle de Chateaubriand et de Michelet. Et puis, qui des deux est le plus intéressant, de Sainte-Beuve ou du chevalier de Florian, par exemple, de Jules Janin ou de Bouchardy, de Paul de Saint-Victor ou de Théodore Barrière ? c’est un point que l’on peut toujours discuter. Mais on ne saurait guère prétendre que Carlyle soit plus intéressant que Cromwell, Michelet que Napoléon, ni même tous les quatre ensemble que la France et que l’Angleterre. Dans la décadence du Romantisme, c’est ce qui a préservé l’histoire de perdre, comme la critique, jusqu’à la conscience de son objet et de ses obligations.
Un autre genre, en revanche, dont la désorganisation intérieure sous l’influence du Romantisme a été presque plus prompte que, celle même de la critique, c’est le drame. Combien de temps encore les Ruy Blas et les Hernani supporteront-ils ce que l’on appelait autrefois l’épreuve des chandelles ? Je n’ose ici le calculer. Mais déjà, du vivant de Victor Hugo, Marion Delorme et Lucrèce Borgia, Marie Tudor et le Roi s’amuse, c’est vainement qu’on a prétendu les imposer à notre admiration. J’en sais bien des raisons, et de plus d’une sorte ; mais aucune, à mon avis, qui soit plus évidente que la perpétuelle intervention du poète dans son œuvre. Faire vivre un personnage d’une vie qui lui soit propre, s’aliéner et s’oublier soi-même en Ruy Blas ou en Guanhumara, ne pas mêler Hugo encore jusque dans les comparses du drame, c’est ce