mais ils remplissent jusqu’aux bords les cadres bien proportionnés oui ils se renferment et se concentrent. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles ils entretiennent et fortifient leur individualité ; l’abandon de la peinture de chevalet, de la peinture méditée et soignée, conduit vite à la décadence ; une école ne saurait vivre longtemps par la seule pratique décorative. Une des autres raisons qui expliquent certaines de leurs tendances est le climat même de l’Angleterre et les habitudes sociales qui en découlent ; les peintures y sont faites pour orner des appartemens confortables, pour être vues, à travers une glace, tour à tour sous un jour brumeux ou sous la lumière artificielle ; l’aspect d’aquarelles, mat et clair, qu’elles gardent presque toutes, même lorsqu’elles sont exécutées par d’autres procédés, est fait pour répondre à ces exigences spéciales.
Il y a bien, en Angleterre, une école classique ; mais la liberté avec laquelle on y traite les sujets traditionnels et qui rappelle, par plus d’un trait, la liberté de ses poètes en semblable matière, ne ressemble plus en rien au pédantisme éphémère qu’y avaient importé au commencement du siècle les émules de notre David. Le mouvement préraphaélite, en reportant les imaginations aux œuvres primitives, d’une saveur vive et bizarre des Italiens du XVe siècle, les a fait remonter du même coup vers les origines de l’art antique. C’est à travers la Renaissance italienne, à travers Botticelli et Mantegna, que la plupart aperçoivent la Grèce comme Shakspeare devinait Rome à travers Boccace et Bandello. Bien que sir F. Leighton, le président de l’Académie, s’efforce, avec une remarquable volonté, de retourner à une antiquité plus pure, il est facile de surprendre, dans ses peintures comme dans ses sculptures, les traces de ses premières admirations ; nous ne saurions nous en plaindre. C’est par les bons côtés, par la vivacité nerveuse du mouvement, par le rythme fort et souple de l’attitude, que ses deux statues, le Paresseux et Fausses alarmes, rappellent Donatello et Benvenuto. Il est encore passé beaucoup, de ces élégances florentines, avec leur grâce un peu contournée, dans les silhouettes des belles filles qui accompagnent Andromaque captive à la fontaine. Même, à dire vrai, les qualités de cette noble composition, longue : et disposée : en bas-relief, sont plutôt sculpturales que pittoresques. Les couleurs y parlent bas, sans toujours bien s’accorder ; le travail de la brosse y est délicat, savant, fin, mais d’une égalité consciencieuse trop prudente et trop égale. En revanche, l’ordonnance est savante et originale ; presque tous les groupes présentent des combinaisons de mouvemens et d’expressions d’une cadence admirable. L’Andromaque, enveloppée de noir, est une