Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 96.djvu/651

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

éclairées par la contradiction, ou de n’aboutir, après des débats irritans, qu’à des résultats négatifs.

« Enfin l’existence simultanée des comités et des bureaux et commissions introduit dans les travaux une complication et une surcharge fâcheuses. Bientôt arrivent la fatigue, le relâchement, les absences multipliées, au grand détriment du prompt et sérieux examen des lois. »

Larabit parla en faveur des comités. Il les recommanda comme un crible utile qui arrêtait les mauvaises propositions de loi et ne laissait passer que les bonnes. Charras prononça quelques mots pour regretter les services que les comités rendaient dans l’examen des pétitions. Après cette courte oraison funèbre, qui n’éveilla aucun écho dans l’assemblée, et une réplique du rapporteur, on passa au vote ; à une très grande majorité, la législative supprima l’institution des grands comités permanens.


III. — CONCLUSION.

En instituant ses grandes commissions permanentes, l’assemblée constituante avait obéi à l’esprit révolutionnaire et aux circonstances exceptionnelles qui avaient présidé à sa naissance. La constituante de 1848 n’était pas seulement l’assemblée unique ; on peut dire qu’au mois de mai, lorsqu’elle se réunit, elle était le pouvoir unique. Le gouvernement provisoire disparaissait ; et, quelques mois plus tard, une constitution nouvelle devait régler l’existence et les conditions du nouveau gouvernement de la France. Entre le II mai et le 10 décembre, le pouvoir exécutif était donc condamné à n’être qu’un pouvoir intérimaire subordonné à toutes les volontés et à tous les caprices de l’assemblée, qui résumait en elle la souveraineté nationale. La commission exécutive ne fut guère autre chose. Si, après les journées de juin, une apparence de dictature fut remise entre les mains du général Cavaignac, les événemens ne tardèrent pas à montrer que cet honnête homme n’était pas de ceux qui usurpent sur les droits des représentans de la nation.

C’est à cette situation révolutionnaire que correspond l’institution des comités, et les juger, sans tenir compte de cette origine, c’est s’exposer à ne pas les comprendre. Le caractère anormal de cette situation était tel que des esprits aussi modérés, des parlementaires aussi prudens que Vivien, Gustave de Beaumont, Dufaure et Duvergier de Hauranne ne furent pas choqués de prêter les mains à cette restauration des formes jacobines, à cette confusion des deux pouvoirs. Ils y étaient d’ailleurs aidés par les arrière-pensées monarchiques de M. de Falloux et de la droite et par les