autre esprit que celui qui l’animait à ses débuts, lorsqu’elle sortait souveraine, confiante et enthousiaste, des entrailles du suffrage universel. Aussi flottante et agitée qu’elle fût demeurée, elle avait acquis le sentiment qu’un gouvernement était nécessaire et que ce gouvernement méritait une certaine liberté et devait avoir ses organes au complet. Les comités n’avaient déjà plus leur principale raison d’être ; l’omnipotence de l’assemblée et leurs conflits incessans, en même temps que les lenteurs de leur procédure, achevèrent d’ébranler leur crédit. Les inventeurs de l’institution n’étaient point responsables des défauts de leur œuvre. Si les comités n’avaient pas été permanens, s’ils avaient été soumis aux fluctuations du tirage au sort ou de l’élection, ils se fussent peut-être maintenus en harmonie avec l’esprit politique de la constituante, mais ils eussent promptement perdu les qualités de science et de spécialité qui faisaient leur principal mérite.
Lorsqu’on examine dans son ensemble l’œuvre de l’assemblée de 1848 et la part que les comités eurent dans cette œuvre, on est amené à constater que le tout se réduit à bien peu de chose. La constituante toucha II beaucoup de questions, remua beaucoup d’idées, elle ne laissa guère d’autre monument remarquable que la constitution de 1848, dont chacun connaît la courte et lamentable histoire. Les quelques centaines de lois qu’elle vota, presque toujours avec une précipitation malheureuse, furent des lois de circonstance et de réaction, comme celles sur l’état de siège, sur la presse, sur l’interdiction des clubs, sur les attroupemens, sur la contrainte par corps et sur la transportation ; ou des décrets-lois sans importance pour l’expédition des affaires courantes. Ces comités n’ont laissé, en réalité, comme œuvre propre que les quelques crédits, votés pour encouragemens aux associations ouvrières, et des lois qui n’ont pas eu de durée, la loi sur le jury, la loi sur l’enseignement agricole et la loi sur les concordats amiables. Les tentatives faites pour renouveler l’organisation de nos grandes institutions de la justice, de l’enseignement, de l’armée, de l’administration échouèrent toutes à l’exception d’une loi sur le conseil d’état. Le comité de législation fut le seul qui put revendiquer quelques succès personnels dans cet ensemble de travaux. Les comités ne rendirent, en réalité, d’autre service que d’arrêter au passage quelques centaines de propositions de loi ridicules ou insuffisamment étudiées, tâche que les commissions d’initiative (ou de propositions, comme on les appelait) remplissaient auparavant d’une façon aussi satisfaisante.
La vérité est que les grands comités peuvent avoir leur raison d’être et leur puissance réelle dans les assemblées uniques, mais