elle est au contraire sujette à varier, comme celles de la caséine et du beurre, mais elle n’oscille qu’entre des limites assez resserrées autour de la moyenne de 5 pour 100 caractéristique de la vache. Les traites du matin, du soir, les premières ou les dernières portions de ces traites, ne diffèrent pas beaucoup entre elles au point de vue du sucre. Ce dernier lait, du reste, est peu surprenant : puisque le sucre est dissous, il peut sans obstacle se diffuser à l’intérieur des glandes mammaires, et l’inégalité des diverses sécrétions, s’il y en avait une, serait bien vite corrigée. Il y a mieux : les mêmes chiffres, à peine diminués ou accrus, conviennent aux laits de la femme, de la chèvre, de la brebis.
Quiconque a usé du lait d’ânesse n’a pu s’empêcher de remarquer la saveur sucrée de ce lait. Le sens du goût, en pareil cas, n’est pas trompeur ; le chimiste, d’accord avec le consommateur, constate positivement un petit excès de lactose. Au demeurant, la différence n’est pas extraordinaire, mais elle devient frappante si l’on étend les recherches jusqu’au lait de jument, dont la teneur en sucre, 8 ou 9 pour 100, est exceptionnelle. Aussi, les Tartares utilisent le lait de leurs nombreuses jumens pour la fabrication d’une liqueur fermentée assez agréable, le koumys. Mais le seul énoncé de ce lait comporte quelques indications tout à fait indispensables.
Nous savons que le lait pendant les chaleurs est sujet à « tourner, » c’est-à-dire à se coaguler tout en devenant aigre. Une véritable fermentation s’est produite : le principe sucré du lait, la lactose, s’est transformé, non pas en alcool, comme lait la glucose du jus de raisin, mais en acide lactique, liquide acre, miscible à l’eau, dont la saveur rappelle un peu celle du vinaigre ordinaire. Ce corps, comme tous les acides, provoque la solidification de la caséine. Rien n’est plus facile, au reste, que d’empêcher le lait de tourner : il suffit d’y mêler une très faible quantité de bicarbonate de soude (sel de Vichy), matière parfaitement inoffensive à faible dose. Au fur et à mesure que les premières traces d’acide lactique prennent naissance, le gaz carbonique est déplacé par le nouveau réactif, beaucoup plus puissant que lui. Il se forme du lactate de soude, et le gaz dégagé s’échappe librement. Ce n’est pas précisément frauder que d’ajouter du bicarbonate de soude ; seulement un excès par trop grand de sel de vichy a quelques inconvéniens que nous signalerons plus loin.
Ce n’est pas à dire que le sucre de lait, surtout en présence de peu de caséine, comme dans le lait de jument, ne puisse se changer aussi en alcool. Les Tartares se contentent d’enfermer le lait dans des outres en cuir de cheval qu’ils agitent de temps à autre et