Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 96.djvu/959

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

viennent de recevoir le compte annuel de leurs affaires par le message du président Harrison. Les États-Unis ne sont pas la région du Nouveau-Monde où fleurissent les révolutions !

C’est la première année de la présidence de M. Harrison qui finit, et, comme ses prédécesseurs à la Maison-Blanche, le nouveau président a la chance de n’avoir à constater à travers tout que la fortune croissante de l’Union américaine. Il peut y avoir, sans doute, il y a sûrement dans cette vaste république, qui s’étend et grandit sans cesse, des troubles partiels, des violences, bien des problèmes qui touchent à la politique intérieure comme à la politique extérieure. Tout finit par se confondre dans un puissant mouvement de prospérité ininterrompue. Le message que M. Harrison vient d’adresser au congrès n’est pas ou ne peut pas être le tableau de ce travail d’une société en formation. Il ne parle que des affaires qui ont occupé ou occupent encore le gouvernement, de l’affaire de Samoa, qui a un instant divisé les États-Unis, l’Angleterre, l’Allemagne, et qui a été réglée à Berlin, des pêcheries du Canada, qui restent toujours une difficulté avec les Anglais, du congrès pan-américain réuni à Washington pour préparer la fédération de toutes les républiques du Nouveau-Monde, — un peu de la révolution du Brésil. Le message promet de reconnaître la révolution de Rio, « si la majorité de la population donne son adhésion aux nouveaux gouvernans ; » il ne va pas au-delà. Les Américains ne portent pas, dans leurs affaires, des idées de propagande républicaine ; ils ne verront, selon toute apparence, dans la république brésilienne un événement heureux que si elle entre dans les vues de fédération américaine auxquelles je cabinet de Washington cherche en ce moment à rallier toutes les républiques du Nouveau-Monde. Les Américains ne sont pas aussi naïfs que M. le ministre des affaires étrangères de France, qui, interpellé il y a quelques jours dans notre chambre, déguisait à peine sa satisfaction de voir naître au-delà des mers une république de plus, un régime « qui se fonde sur le principe de la souveraineté nationale, sur le principe électif. » Les Américains ne font pas de la diplomatie avec des ingénuités républicaines.

Quant aux affaires intérieures des États-Unis, elles se résument surtout dans un fait invariable, triomphant, que le message présidentiel a encore une fois à constater. M. Harrison annonce au congrès que dans la dernière année financière, tous services payés, y compris l’amortissement, il est resté un excédent de 57 millions de dollars, près de 300 millions de francs. Dans l’année courante, l’excédent est de 44 millions de dollars. Il y a déjà quelques années que ce phénomène dure, et il paraît devoir se prolonger. Chose surprenante ! Il y a au monde aujourd’hui un trésor d’état qui souffre de pléthore, de l’excès de ses ressources, qui ne sait que faire de ses richesses ! Et comme les douanes sont la première, la plu ; abondante source de