Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 100.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que lui a imposée M. Vital-Cornu, il pose lui-même une main sur la jambe du soldat et lui enfonce un doigt dans la chair, et la distraction paraît vraiment à la fois impossible et offensive. On ne s’explique guère non plus que le soldat ait attendu de sentir ce pauvre vieux entre ses jambes pour commencer à tirer son épée. Toutes ces invraisemblances choquantes, jointes à un entortillement de lignes assez confus dans le bas, nuisent beaucoup aux qualités d’énergie sculpturale que M. Vital-Cornu a déployées dans l’exécution difficile d’une composition mal venue. Le Brennus de M. Gauquié a les qualités et les défauts de son groupe de Bacchante et Satyre. L’attitude est nette et parlante. Le chef gaulois, d’un geste impératif, levant dans sa main droite la lourde épée qu’il va jeter dans la balance, est en train de crier le Vœ victis ! L’exécution est résolue, ferme et large. L’aspect est un peu commun. Ce Brennus est le meilleur des héros gaulois, toujours assez nombreux au Salon, et parmi lesquels on remarque une figure assez vive et très soignée, le Jeune Gaulois en vedette, par M. Léon Pilet. L’histoire sacrée a inspiré à M. Aizelin une Judith en bronze, d’un beau caractère, dont nous avions déjà vu le modèle, à M. Larche, un Jésus enfant devant les docteurs, d’une simplicité charmante et intelligente ; à Mlle Jeanne Itasse, un Saint Sébastien en haut relief d’une exécution pittoresque et vigoureuse. On peut compter encore parmi les compositions historiques des groupes allégoriques comme celui de M. Levasseur, une mère embrassant son enfant blessé : Après le combat, travail dont le modèle valut déjà à son auteur une médaille en 1888 ; comme le plâtre de M. Fosse, la Fin d’un héros, où le sculpteur, en suspendant à un arbre un vaincu percé de flèches, s’est souvenu du Serment de Spartacus par M. Barrias ; comme le marbre de M. Schraeder pour le Muséum : Science et mystère, un vieillard assis contemplant un œuf qu’il tient à la main ; comme celui de M. Albert Lefeuvre : Pour la Patrie. Ce dernier groupe dont la première pensée remonte aussi à quelques années en arrière, car M. Albert Lefeuvre, si nous ne nous trompons, le conçut à son retour d’Italie, se distingue de tous les autres par un accent personnel de juvénilité virile et généreuse. L’ouvrage, dans son ensemble, a une forte saveur florentine et atteste que M. Albert Lefeuvre a fréquenté avec fruit Donatello. Ce sont deux jeunes gens debout, placés côte à côte, prêts à marcher en avant, la main dans la main, comme s’ils venaient de prêter un serment solennel. L’un, vêtu de la toge, tenant à la main un rouleau de papyrus, a le front large et carré d’un jurisconsulte romain ; l’autre, en habit de soldat, corsage de cuir, ceinture de lanières, épaulières et jambières de fer, une main appuyée sur une