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délibérations de ses collègues un projet de loi relatif à la saisie des mobiliers en cas de non-paiement du loyer. Les cours de comté et de justice étaient dépouillées du pouvoir d’ordonner la saisie si la valeur des meubles était inférieure à vingt livres sterling. Le propriétaire conservait bien le droit d’expulser le débiteur, mais il n’avait aucun intérêt à en user ; le locataire, ou son successeur, n’ayant pour se soustraire à ses obligations qu’à faire, à l’avance, estimer au-dessous de la valeur véritable son mobilier et ses instrumens de travail. On conçoit qu’une loi semblable eût été funeste aux propriétaires. L’association de Liverpool a été une des premières à se joindre aux protestations qui se sont élevées de tous côtés. Elle a fait remarquer, non sans succès, que le vote d’un pareil projet bouleverserait de fond en comble les conditions de la petite propriété en Angleterre. Elle a ajouté que les ouvriers seraient, eux aussi, les victimes du nouvel état de choses, car les délais qu’on accorde assez libéralement aux locataires en retard leur seraient désormais impitoyablement refusés. Ainsi, dans ce cas comme dans tant d’autres, c’est une corporation puissante qui oppose à des projets mal conçus, insuffisamment élaborés, les objections que lui suggèrent sa sagesse et son expérience. Comprise et pratiquée de cette manière, l’association peut et doit exercer, dans les affaires intérieures d’un pays, la plus salutaire influence.

L’époque est aux ligues et aux fédérations et nous pourrions facilement poursuivre cette étude des unions patronales dans l’ouest de l’Angleterre. Bornons-nous, avant d’abandonner notre sujet, à rappeler qu’à côté des intérêts de « métier » on a su faire place à la philanthropie la plus éclairée. Nous pourrions nous étendre longuement sur l’organisation de certaines œuvres protectrices de l’enfance ou de la vieillesse, parler des asiles, des hôpitaux, des refuges, en un mot des innombrables institutions de charité que soutiennent et qu’alimentent les seules contributions volontaires. A quoi bon ? L’Angleterre n’a pas le monopole des établissemens de ce genre ; ce qu’on peut dire, à sa louange, c’est qu’en ces matières peu de peuples font preuve d’autant de ténacité et de persévérance qu’elle. Les sociétés de tempérance n’arrivent pas à combattre sérieusement les progrès de l’alcoolisme : pourtant cette impuissance relative redouble et stimule encore, si c’est possible, le zèle effréné de l’armée du blue ribbon.

Concluons ; de toutes parts, l’esprit d’association est en progrès ; à Carlisle, à la suite d’une conférence, on a jeté les bases d’une société nationale des constructeurs de navires. On a adopté les règles qui avaient été précédemment fixées par une corporation similaire existant, depuis de longues années, à Glascow. Loin de