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BLAISE PASCAL

les provinciales


Les lecteurs du XVIIe siècle étaient familiers de longue date avec le problème de la grâce. Il faut en instruire ceux d’aujourd’hui. La destinée humaine et les conséquences du péché originel sont le terrain, sinon le sujet, de la lutte racontée au début des Lettres provinciales dans un style qu’Aristote approuve sous le nom d’eutrapélie et que condamne saint Paul.

Le mot Eutrapélie a disparu de nos dictionnaires ; celui de Trévoux le définit ainsi :

Eutrapélie. — Manières gaies, agréables, ingénieuses, affables ; façon d’agir plaisante, facétieuse, qui plaît. Le mot ne se dit guère qu’entre savans. Il est grec.

Ce mot grec, qui reste français, définit mieux qu’aucun autre le style des Lettres provinciales. Pascal use du droit de faire rire en traitant des sujets sérieux. À ceux qui trouvent en telle matière la plaisanterie hors de sa place, il répond :

« En vérité, mes pères, il y a bien de la différence entre rire de la religion et rire de ceux qui la profanent par leurs opinions extravagantes. Ce serait une impiété de manquer de respect pour les vérités que l’esprit de Dieu a révélées, mais ce serait une autre impiété de manquer de mépris pour les faussetés que l’esprit de l’homme leur oppose. Car, mes pères, puisque vous m’obligez