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monde a répondu en chœur : « Moi ! moi ! moi ! » J’ai démêlé dans la confusion des paroles : « Je l’embrasse, je l’aime, dites-lui qu’il vienne, que nous l’attendons. » Et quand le tintamarre a cessé, la douce voix de Mme la comtesse Jules m’a fait entendre plus distinctement ceci : « Dites-lui que, s’il avait daté sa lettre d’une manière lisible, je n’aurais pas manqué à lui répondre ; mais qu’aidée par plusieurs experts en l’art de déchiffrer, il ne m’a jamais été possible même de soupçonner le lieu d’où venait sa lettre, ni celui, par conséquent, où devait aller la mienne. » Là-dessus, nous avons parlé de vous, de l’amiral Keppel, et puis du dindon, et puis de la prise de nos deux frégates, et puis des bouffons, et puis de l’inquisition d’Espagne, et puis d’un gros fromage de Gruyère que notre ambassadeur en Suisse vient d’envoyer à ses enfans, et puis de l’étrange conduite des Espagnols à notre égard, et puis de Mlle Théodore qui danse une fois mieux que jamais, et qui nous a, hier, autant charmés par son talent que Mlle Cécile par ses jeunes attraits. »

A défaut de chansons nouvelles, on fait fête aux anciennes, et M. d’Adhémar obtient grand succès avec des couplets composés en 1773, par de l’Isle, en l’honneur de Mmes de Poix, d’Ossun et de Fleury.


SUR TROIS SOEURS.
AIR : Du haut en bas.
Elles sont trois,
Riant, chantant, faisant tapage ;
Elles sont trois,
Ayant un fort joli minois.
Une eût affolé le plus sage ;
Mais pour assurer leur ouvrage,
Elles sont trois.
Elles sont trois
Pour forcer les cœurs à se rendre,
Elles sont trois.
On a tout l’embarras du choix :
D’aimer on ne peut se défendre,
Mais comment le leur faire entendre ?
Elles sont trois…
Du nombre trois
Tout bon chrétien est idolâtre,
Du nombre trois.
Dieu lui-même s’est mis en trois.
Ici, l’on se mettrait en quatre
Plutôt que de laisser rabattre
Du nombre trois.