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En Suisse, l’assurance du bétail, obligatoire, se réalise au moyen de caisses cantonales ; la perception annuelle est de 0 fr. 10 à 0 fr. 20 par tête d’animal, et certaines caisses sont si riches qu’elles distribuent des primes pour l’élevage du bétail et les constructions d’étables : un service vétérinaire, organisé avec le plus grand soin, rend assez rares les maladies contagieuses. Le principe d’une organisation provinciale de l’assurance, patronnée par l’État, paraît devoir triompher en Belgique ; et, quant à l’Allemagne, où depuis longtemps l’assurance du bétail se fait par des mutualités locales que subventionnent le gouvernement ou les communes, le ministère de l’agriculture vient d’élaborer un système national d’assurances contre la mortalité de l’espèce bovine ; dès 1883, il y avait en Prusse 4 021 syndicats locaux qui avaient reçu 1, 025, 193 têtes de bétail, pour une somme de 42 226 044 marcs. En Hanovre, en Alsace, dans le grand-duché de Bade, les caisses mutuelles communales d’assurances prospèrent généralement et demandent à leurs membres une cotisation de 1 à 1 1/2 pour 100 de la valeur du bétail.

On voit le chemin que les fruitières ont parcouru depuis le temps où l’on se bornait à des prêts de lait réciproques : elles ont permis aux petits propriétaires de produire aussi bien que les grandes exploitations, elles ont appliqué le principe de la division du travail avec tous ses avantages. Pour remplir toute leur carrière, elles doivent être protégées contre l’étranger, obtenir des débouchés, la révision des tarifs de chemins de fer, l’égalité de traitement devant la douane parisienne. Qu’elles réalisent aussi l’amélioration de leur matériel, le perfectionnement de la fabrication, l’assurance mutuelle, la solidarité entre les associés d’une même région. Et surtout qu’elles se gardent bien d’imiter cette bonne femme qui, toutes les fois qu’elle faisait une omelette, maudissait Colbert parce qu’il avait mis un impôt sur les œufs : personne n’entendait son imprécation solitaire. Qu’elles forment faisceau pour attaquer les abus, pour défendre leurs droits. Le monde appartient à ceux qui se réunissent, à ceux qui parlent haut et combattent avec discipline.


Victor du Bled.