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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 98.djvu/380

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mis en lumière ne compense pas le bénéfice tangible que lui rapporterait la vente de son livre. Le congrès s’est abstenu de se prononcer, estimant, probablement, que si tous les auditeurs n’achètent pas le livre, tous, en tout état de cause, ne l’eussent pas acheté, que la lecture publique peut décider un certain nombre à s’en rendre acquéreur, et que, tout compte fait, l’auteur gagne plus qu’il ne perd.

Enfin, et pour épuiser les questions soulevées par la propriété des œuvres littéraires, les congrès, notamment ceux de Genève en 1886 et de Venise en 1888, ont à plusieurs reprises discuté les rapports des auteurs et des éditeurs. Question délicate, car, si le bon sens et l’équité rendent leurs intérêts identiques une fois l’accord conclu, des complications peuvent se produire et se produisent qui altèrent la nature de leurs rapports et créent des conflits d’intérêts. Aussi, tout en laissant aux auteurs leur droit incontestable de traiter au mieux de leurs convenances avec leurs éditeurs, le congrès de Venise s’est-il borné à émettre le vœu qu’en l’absence de conventions particulières ces rapports fussent réglés par une loi spéciale. Il a également soumis à l’examen des intéressés quelques points de détail tels que les suivans : l’éditeur, acquéreur d’une œuvre littéraire, est tenu de la publier et de la produire ; en d’autres termes, on ne saurait, par achat, confisquer et supprimer un ouvrage. Dans le même ordre d’idées, si un éditeur, acquéreur du droit exclusif de publication, cesse cette publication, soit volontairement, soit par impossibilité de la continuer, l’auteur, rentré en possession de ses droits, peut les céder à un autre éditeur. L’éditeur ne peut modifier le texte de l’écrivain, non plus que l’auteur y faire des retouches onéreuses pour l’éditeur ou qui, changeant la nature et le but de l’ouvrage, porteraient atteinte aux intérêts commerciaux de ce dernier.

L’Association littéraire et artistique, née en 1878 de l’initiative de la Société des gens de lettres, ne bornait pas ses efforts à élucider ces questions multiples. Fidèle à son titre d’Association internationale, elle créait une Union en vue de la protection des droit des auteurs sur leurs œuvres littéraires et artistiques, et, faisant appel aux écrivains éminens de tous les pays, elle travaillait à l’élaboration d’un code commun de la propriété littéraire. Étant donnés les intérêts en conflit et les difficultés à surmonter, elle a obtenu de grands et de sérieux succès, ralliant à ses idées modérées et sages, l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la Grande-Bretagne, l’Italie, Haïti, le Luxembourg, la Suisse, Monaco et la Tunisie, qui signaient, en 1886, avec la France, la convention dite de Berne, consacrant les conquêtes faites par l’active propagande de l’Association littéraire et artistique internationale. Elle vise à les étendre