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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 98.djvu/627

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aujourd’hui au pouvoir proposent de la pratiquer. Suivant l’article 10 de la loi des pauvres, Armengesetz, du 29 avril 1869, en Bavière, l’assistance publique est obligée « d’accorder aux personnes devenues incapables de travailler la nourriture nécessaire pour entretenir la vie, les vêtemens, le logement, le chauffage, de procurer aux malades les secours dont ils ont besoin, les soins médicaux et les remèdes voulus, de pourvoir à l’enterrement des morts, et de veiller à l’éducation et à l’instruction des enfans pauvres. »

Dans une étude très remarquée sur la vie et les salaires à Taris, M. le comte Othenin d’Haussonville[1] fixe le coût de la vie, pour l’ouvrier parisien, de 850 à 1,200 francs par an, dont 550 à 750 fr. pour la nourriture. C’est l’équivalent d’un salaire de 2 fr. 75 à 4 francs par jour ouvrable, avec la misère, même pour un individu isolé, « quand son gain reste au-dessous de cette somme. En Allemagne, la moyenne des salaires portés en compte pour l’assurance contre les accidens, à raison de 3,861,560 ouvriers assurés, avec un gain de 2,389 millions de marcs, atteint 619 marcs par an, soit environ 2 fr. 60 cent, par jour ouvrable et par tête. Comme les familles ouvrières allemandes sont très chargées d’enfans, le revenu ou les dépenses d’entretien par tête restent nécessairement beaucoup au-dessous de la somme admise pour le coût de la vie à Paris. Une enquête minutieuse et approfondie, faite à Mulhouse, sous les auspices de la Société industrielle, nous fournit des renseignemens précis sur les conditions d’existence de notre population ouvrière en Alsace. D’après les comptes détaillés que j’ai sous les yeux, portant sur un ensemble de 16 ménages de professions diverses, composés chacun de 5 individus, soit le budget de 80 personnes, choisis sur un nombre beaucoup plus considérable, les frais d’entretien, par tête et par an, atteignent ici 365 francs ou 1 franc par jour en moyenne. Il s’agit, bien entendu, d’individus rivant en famille et non pas isolément, ce qui entraînerait une dépense plus élevée. Pour les 16 ménages en question, composés chacun du père, de la mère et de trois enfans, les dépenses totales pendant l’année ont été de 29,132 francs, à savoir : 4,367 francs pour le logement, 4,800 francs pour des vêtemens, 17,591 francs pour la nourriture, 2,367 francs pour menues dépenses. La nourriture prend ainsi 61 pour 100 de l’ensemble des dépenses, les vêtemens 16 pour 100, le logement 15 pour J00, les menus frais 8 pour 100. Ces menus frais comprennent bien des choses, mélangées d’un peu de coulage, suivant l’expression populaire. Ne recommandons pas d’en éliminer une modeste mesure de superflu, sous prétexte d’économie stricte. Notre avis est celui de M. Jules Simon : « Qui ne sait

  1. Voyez la Revue du 15 avril 1883.