Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 98.djvu/896

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CATHERINE II


D’APRÈS DES MÉMOIRES INÉDITS

Il y avait une fois une petite princesse que de bonnes fées avaient comblée de dons merveilleux. Son enfance, cependant, s’écoula assez tristement, dans une petite ville d’Allemagne où son père était en garnison. Ce dernier, rejeton d’une minuscule famille princière, était général prussien et tirait de sa solde le plus clair de son revenu. Il vivait bourgeoisement avec sa femme à Stettin, où notre petite princesse vit le jour en 1729. Quand elle eut quatorze ans, on songea à la marier. Sa mère se souvint d’un sien cousin qui, chef d’une petite principauté allemande, se trouvait être, par sa mère, le petit-fils de Pierre le Grand, et, en conséquence, neveu de l’impératrice régnante Élisabeth, qui gouvernait la Russie depuis plusieurs années, sans avoir songé à se marier. Pierre, duc de Holstein, avait été appelé à Moscou et élevé comme héritier présomptif de la tsarine. Ce fut donc à Moscou que la princesse d’Anhalt-Zerbst conduisit sa fille, où l’impératrice Élisabeth ne tarda pas à la fiancer à son neveu. Celui-ci, mal élevé, fantasque et bizarre, maltraita sa femme et passa sa vie à jouer avec des soldats de plomb et à exécuter militairement les rats qui assaillaient ses forteresses en carton. Catherine, tout en subissant les traitemens les plus