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commencèrent à reproduire sur les parois des catacombes les scènes de l’Ancien-Testament et les paraboles du Nouveau, ce fut à l’art classique et même mythologique qu’ils empruntèrent leurs premiers modèles. Mercure criophore fournit le type du Bon-Pasteur. Orphée apprivoisant les animaux féroces devint un symbole du Christ et de sa prédication. Le chrétien s’attachant à la croix pour dompter les tentations fut représenté par Ulysse lié au mât de son navire pour résister aux chants des Sirènes. Par une ingénieuse application d’un mythe que le paganisme avait déjà spiritualise, Psyché offrit l’image de l’âme humaine s’unissant à l’Amour remplacé par un ange. Les religions de la Gaule et de l’Inde ont donné l’exemple d’assimilations analogues, du jour où elles se sont trouvées en contact avec la symbolique de nations plus avancées.


II

Des symboles peuvent même différer d’aspect et cependant se rattacher les uns aux autres par les liens d’une filiation plus ou moins directe. Ceci nous amène à examiner les causes qui peuvent altérer les formes des représentations symboliques. Il y a d’abord une tendance à réduire ou à simplifier la figure, soit pour l’enfermer dans un moindre espace, soit pour diminuer le travail de l’artiste, surtout quand il s’agit d’une image compliquée, d’un emploi fréquent. Dans tous les systèmes d’écriture où les caractères ont débuté sous forme d’hiéroglyphes, il n’y a qu’à gratter la lettre pour retrouver le symbole. On sait que notre voyelle A était originairement une tête de bœuf, un bucrâne, et celui-ci, à son tour, représentait l’animal entier, conformément à la règle populaire que la partie vaut pour le tout, aussi bien en matière de symboles que de sacrifices. C’est ainsi encore que, dans les signes du zodiaque, le lion est simplement représenté par sa queue. D’autres fois ce sont, au contraire, des additions et des enjolivemens dictés par des préoccupations esthétiques. Tel a été notamment le sort de presque tous les symboles adoptés par la Grèce, dont l’art, si puissamment original, n’a jamais accepté les types étrangers sans leur imprimer de profondes et heureuses modifications.

Le caducée n’a pas toujours offert la forme classique de deux serpens symétriquement enlacés autour d’une verge ailée. Sur les plus anciens monumens, c’est un bâton dont la tête noueuse se bifurque en deux branches qui s’arrondissent pour se recroiser, puis s’écartent pour se rapprocher de nouveau, de façon à former un 8 placé au bout d’une hampe et ouvert par le haut. Les poésies