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Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 99.djvu/708

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REVUE DRAMATIQUE

Théâtre-Français : Une Famille, comédie en 4 actes, en prose, de M. Henri Lavedan.

On ne saurait reprocher à M. Henri Lavedan d’avoir beaucoup d’amis : on peut reprocher à ses amis leur imprudence et leur excès de zèle. Nos comédiens ordinaires n’avaient pas encore commencé de répéter Une Famille, — qui s’appelait en ce temps-là Deux Belles-Filles, — que les amis en disaient merveilles : et si la Vie parisienne ou le Figaro ne la prônaient pas comme l’effort de l’esprit humain, il ne s’en fallait de guère. C’était l’œuvre d’un jeune ; et la comédie de l’avenir allait s’emparer avec lui des planches du Théâtre-Français. Le moins « emballé » de tous disait encore, qu’exilée depuis longtemps de la scène, la vérité y allait reparaître avec Une Famille, et il en donnait pour preuve ou pour garant l’œuvre entière de Manchecourt. Manchecourt est le pseudonyme de M. Henri Lavedan, quand il écrit dans la Vie parisienne ; et ses œuvres complètes se réduisent à quelques dialogues : la Haute, et à une petite nouvelle humoristique : Inconsolables, où ne manquent d’ailleurs ni l’observation, ni l’esprit, ni l’originalité du tour et le don de l’ironie.

Mais ce qu’il y a de plus curieux et de plus instructif, c’est qu’Une Famille n’ayant guère obtenu, l’autre soir, qu’un succès d’estime, ou d’indulgence, à qui croyez-vous que les amis de M. Henri Lavedan s’en soient pris ? Ce n’est pas à eux-mêmes : ce n’est pas non plus à l’auteur ; c’est aux comédiens d’abord, et c’est ensuite au public. Oui, les comédiens, sous le couvert de son intérêt même, gens de routine et de métier comme ils sont, ont obtenu de M. Lavedan qu’il sacrifiât ce qu’il