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sa première période, accompagné d’aucune crise ni d’aucune mesure de rigueur.

Ce fut là un fait bien remarquable, et difficilement on en trouverait un autre pareil dans l’histoire religieuse. Plus d’une fois, sans doute, on conseilla au roi de sévir contre les endurcis ; il n’est pas prouvé qu’il ait jamais cédé. Il se bornait à donner les fonctions de son entourage et toute l’importance qui dépendait de lui à des hommes pieux, qui lui étaient recommandés par Isaïe, comme fut Eliaqim, fils de Helqiah. Autant que nous savons, il ne persécuta personne. Même la ville de Jérusalem ne fut pas ramenée à un état de purification absolue. On y voyait des représentations idolâtriques ou du moins scandaleuses pour les iahvéistes austères. Le roi ne se croyait pas le droit de supprimer ces représentations, contraires à ses sentimens personnels, mais que les mœurs toléraient.

La circoncision, de simple préparation au mariage qu’elle était à l’origine, devenait de plus en plus une règle religieuse à Jérusalem. C’était un des usages les plus anciens de la nation ; mais la signification religieuse n’en fut pas d’abord très précise. Les prophètes ne parlent jamais de cette pratique. Ils la trouvaient évidemment chose secondaire. Ni le livre de l’Alliance, ni le Décalogue ne contenaient non plus rien à cet égard, sans doute parce que la chose allait sans dire et n’était pas encore tenue pour un précepte. Le caractère religieux, cependant, prenait de plus en plus le dessus. La loi de la circoncision allait bientôt devenir fondamentale. Des traits importans du récit élohiste ont pour objet de montrer que cette opération est obligatoire chez les Abrahamides. Tous les gens prévoyans, tous les bons pères de famille la pratiquaient sur leurs enfans, pour leur éviter plus tard une situation fausse, exactement comme il en est de nos jours de la vaccination. Il fut reçu que Iahvé le voulait ainsi et qu’on manquait à un précepte de Iahvé en ne circoncisant pas son fils dès ses premiers jours.

Les fêtes juives se développaient, mais n’arrivaient à rien d’universel, de national. La Pâque, fondue avec la fête des pains azymes, devenait la grande fête annuelle. On l’inaugurait dans la nuit ; elle était accompagnée de réjouissances et de chants. Les gens pieux croyaient déjà que cette fête était le mémorial de la sortie miraculeuse de l’Egypte. Mais pour la plupart, c’était simplement la grande fête de Iahvé au printemps. L’idée se répandait de plus en plus que tous les actes religieux gagnaient à être célébrés à Jérusalem, au temple. La petitesse du royaume de Juda rendait une telle idée possible. Les fidèles les plus éloignés de Jérusalem n’avaient guère plus de dix lieues à faire pour y venir. Déjà un groupe de dévots très exaltés se formait autour du temple ; ils en devenaient les hôtes,