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Il est certain seulement que l’institution avait dévié de son véritable et légitime objet et que ces libéralités, si profitables pour ceux qui surent y participer, causèrent à l’État des pertes considérables, évaluées à plusieurs dizaines de millions, un tarit excessif ayant rompu toute relation entre l’intérêt servi et le taux des placemens.

Les versemens annuels, qui ne dépassaient pas 14 millions en 1875, atteignirent 53 millions en 1863, 68 en 1881, 56 en 1882. Il fallut inscrire dans la loi de finances du 30 janvier 1884 une dotation suffisante pour couvrir les pertes subies jusqu’à la fin de l’année précédente et assurer le service des rentes viagères en cours à la même date. D’ailleurs, depuis un an déjà, le taux de l’intérêt, dont il doit être tenu compte dans la constitution des rentes, avait été abaissé de 5 à 4 1/2 pour 100, et le montant des versemens effectués en 1883 s’était trouvé ramené, par le seul effet de cette mesure, vainement réclamée depuis 1876 par la commission de surveillance de la Caisse, à 39 millions, soit 17 millions de moins qu’en 1881. Les capitaux de placement, qui ne cherchaient qu’un intérêt avantageux, se trouvèrent écartés dès lors de la Caisse. Depuis 1886, le taux de l’intérêt est devenu mobile, il est actuellement de 4 pour 100 ; la limite des versemens a été abaissée et le maximum de la rente viagère individuelle ramené à 1,200 francs. Aussi le montant des versemens n’a-t-il plus dépassé de 22 à 25 millions dans chacune des dernières années. La Caisse a été rappelée à son vrai rôle, qui est de donner gratuitement aux travailleurs sans fortune la facilité de garantir, en pleine sécurité, leur vieillesse contre l’éventualité d’une indigence absolue. L’importance des versemens a diminué, mais le nombre des participans s’est accru, ce qui était le dessein poursuivi par le législateur.

Depuis son origine jusqu’au 1er  janvier 1889, la Caisse des retraites a reçu, en versemens directs ou en arrérages, un total de 952 millions. Elle a payé, en rentes viagères et remboursemens de capitaux réservés, 233 millions. Elle possédait donc, à la dernière date, un capital de 719 millions, représenté, pour 672 millions, par des rentes ou valeurs diverses produisant un revenu de 26,571,000 francs, et, pour 117 millions, par le solde en compte courant au trésor à 4 pour 100[1]. Dans l’année 1888, la Caisse a reçu 55 millions, dont 24 de versemens nouveaux et le solde en arrérages, et elle a déboursé 40 millions, dont 29 d’arrérages de rentes viagères, qui ont donné lieu à près de 500,000 quittances.

  1. Au 30 septembre 1890, le total des rentes et valeurs s’élevait à 700,227,802 fr., et le compte courant à 19,732,182, — ensemble 750 millions.