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son étude. En 1826, il publiait le projet d’un canal latéral à la Seine, allant du Havre à Paris et offrant partout aux navires un tirant d’eau de 6 mètres, tout à fait extraordinaire pour l’époque. Empruntant alternativement tantôt une rive, tantôt l’autre de la Seine, ce canal la traversait six fois, ce qui ne pouvait avoir lieu qu’au moyen d’ouvrages, et en particulier de barrages, d’une exécution difficile et coûteuse.

Au même moment à peu près, une société, à la tête de laquelle se trouvait Flachat, sollicitait la concession d’un canal fort semblable à celui de Bérigny, et en même temps, celle d’entrepôts généraux des douanes, à Paris, où il n’en existait pas encore. Les deux propositions étaient liées, et la seconde intéressait les demandeurs au moins autant que la première. La suite le fit bien voir. En présence, en effet, des difficultés d’exécution et de l’aggravation de dépense que révéla l’étude du projet, la société Flachat en réduisit successivement l’importance. En 1829, il ne s’agissait plus que d’un canal entre Rouen et Paris, avec 3m,50 de tirant d’eau ; la navigation du Havre à Rouen devait continuer, comme par le passé, à se faire par la Seine. En 1831, il s’agit de moins encore. Le 8 septembre, la société Flachat écrit au ministre des travaux publics que les événemens politiques la contraignent à restreindre ses projets et à modifier son programme. Elle demande l’autorisation d’établir tout d’abord des entrepôts sur les terrains qu’elle avait eu le soin d’acquérir, éventuellement, dans la presqu’île de Gennevilliers, et de relier ces établissemens à Saint-Denis et à Paris par des routes et des ponts à péage. Ultérieurement, on aurait entrepris la construction d’un canal de Rouen à Bezons[1]. Ces propositions, si éloignées du projet primitif, ne furent pas accueillies, et en 1832, la société Flachat cessait de faire parler d’elle. Son créateur allait bientôt prendre sa revanche dans la grande industrie des chemins de fer.

A partir de ce moment, en effet, les chemins de fer absorbèrent l’attention publique, et ce dernier échec ferma la première série des tentatives ayant pour objet d’amener les navires de mer à Paris.

  1. C’est seulement en 1865 qu’un entrepôt de douanes fut établi à Paria, et c’est à Paris-Port-de-Mer qu’on le doit. Mais Paris-Port-de-Mer était alors le nom d’un petit navire que son inventeur, M. Le Barazer, renversant le problème, prétendait avoir doué à la fois des qualités du bâtiment de mer et de celles du bateau de rivière. L’empereur s’y intéressait et lui avait accordé une subvention. Au retour d’un voyage à New-York, heureusement effectué, le Paris-Port de-Mer fut arrêté par la douane à Rouen et obligé d’y décharger sa cargaison. Peu après, un décret impérial instituait l’entrepôt des douanes de Paris. Quant à Paris-Port-de-Mer, il périt l’année suivante.